Euro-2016: l'affaire de la sex-tape, le poison des Bleus

"Non sélectionnable": voilà le statut peu enviable du meilleur buteur en activité des Bleus (27 réalisations) alors que se profile le grand rendez-vous continental organisé sur le sol français (10 juin-10 juillet).

Soupçonné de "complicité de tentative de chantage" et de "participation à une association de malfaiteurs" contre Mathieu Valbuena, le joueur du Real Madrid a plongé la Fédération française de football dans un immense embarras, ressuscitant le spectre de "Knysna" et l'obligeant à le bannir de la sélection tant que sa situation judiciaire n'aura pas évolué.

Un énorme boulet pour une équipe de France au crédit retrouvé grâce au Mondial-2014 (quart de finale) et qui doit désormais laisser entre les mains de la justice le sort de Benzema, et par conséquent la composition de sa ligne d'attaque lors du Championnat d'Europe.

A la FFF, on guette fébrilement chaque développement du dossier et celui intervenu le 18 février a tout de même constitué une véritable lueur d'espoir. La juge d'instruction Nathalie Boutard a en effet décidé de lever partiellement le contrôle judiciaire du joueur et de supprimer l'interdiction d'entrer en contact avec Valbuena.

Horizon plus dégagé 
Cette décision lève ainsi en théorie le principal obstacle pour le retour de Benzema. Le parquet a fait appel mais celui-ci, qui sera examiné vendredi, n'est pas suspensif. 

L'horizon de Benzema semble donc beaucoup plus dégagé mais pas question pour autant de crier victoire à la FFF où la prudence est de mise, en attendant la décision finale de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles.

Le sélectionneur Didier Deschamps est logiquement lui aussi dans une position d'attente. "C'est un premier pas, mais le parquet a fait appel. Au jour d'aujourd'hui, il n'est toujours pas sélectionnable", a-t-il déclaré, le 22 février sur Canal+. 

Toute la question est de savoir quelle sera la position de la FFF en cas de levée définitive du contrôle judiciaire. Osera-t-elle réintégrer Benzema malgré son statut de mis en examen?

Sur un plan strictement sportif, son retour va de soi. Sans rival à sa mesure en bleu en dépit d'une inefficacité chronique dans les matches à élimination directe en phases finales (0 but en 3 tournois), Benzema traverse à 28 ans l'une des périodes les plus fastes de sa carrière avec 23 réalisations en 24 matches cette saison avec le Real Madrid.

Attention à l'image 
En terme d'image, les conséquences pourraient être en revanche désastreuses. La pression populaire et politique est immense autour de la FFF et des Bleus, hôtes de l'Euro et à ce titre particulièrement exposés.

Plus de cinq ans après le fiasco du Mondial en Afrique du Sud et la fameuse grève de l'entraînement en mondovision, la France se passerait bien d'un nouveau scandale.

Le 1er décembre, le Premier ministre Manuel Valls n'a pas hésité à se prononcer clairement pour une non-sélection du joueur. Quant aux enquêtes d'opinion, elles montrent toutes un large rejet de Benzema: sept Français sur dix sont opposés à sa sélection à l'Euro, selon un Baromètre Sport réalisé pour RTL et Winamax, diffusé dimanche.

La blessure à la cuisse de l'attaquant et son probable forfait pour le prochain rassemblement (deux amicaux contre les Pays-Bas et la Russie, les 25 et 29 mars) offrent en tout cas un petit répit à la FFF et vont lui permettre de gagner un peu de temps d'ici la divulgation de liste des 23 pour l'Euro à la mi-mai.

Rassuré par le tirage du 1er tour de l'Euro (Roumanie, Albanie, Suisse), le pragmatique Deschamps a de toutes façons déjà testé une batterie de prétendants pour pallier son absence et/ou celle de Valbuena (Gignac, Lacazette, Ben Arfa, Coman, Ntep, Fekir...).

En ce qui concerne le onze de départ, le trio d'attaque Griezmann-Giroud-Martial, brillant contre l'Allemagne (2-0), le 13 novembre en amical, est en pole.

Il leur restera deux rencontres, face au Cameroun (30 mai) et l'Ecosse (4 juin), et deux stages, au Pays Basque (17-21 mai) et en Autriche (à Innsbruck du 31 mai au 4 juin), pour se roder au cas où, avant le grand saut, le 10 juin contre la Roumanie au Stade de France.