Ce n’est pas la première fois que le Maroc se positionne pour un jeune joueur de football d’origine marocaine formé à l’étranger. Dès les années 90, la fédération a mis en place un système de détection dans les pays de résidence de la communauté marocaine à l’étranger visant à repérer les joueurs prometteurs pour les intégrer en équipe nationale.
C’est de bonne guerre, le Maroc s’est inspiré de la plupart des puissances du football mondial. Messi formé au Barça a intégré l’équipe nationale d’Argentine. Il est vrai qu’il a d’abord joué en Argentine avant de rejoindre Barcelone. Ce n’est pas le seul: Gonzalo Higuain, son partenaire en équipe d’Argentine, a suivi le même chemin. Il est pourtant né à Brest et aurait pu jouer pour l’équipe de France.
Les joueurs convoqués par les différents entraineurs du Maroc n’ont pas forcément répondu favorablement. Certains ont fait de belles carrières dans leur pays de résidence. Marouane Fellaini et Nacer Chadli, ont choisi les Diables Rouges de Belgique, pourtant Nacer Chadli avait porté les couleurs nationales pour un match amical, Anwar Ghazi et Mohamed Ihattaren ont choisi les Pays-Bas et Adil Rami l’équipe de France et la liste est longue.
A l’inverse, on aurait pu perdre en 2022, Abdessamad Ezzalzouli, une des étoiles montantes du Barça post Messi. En effet, ce jeune ailier, né à Béni Mellal, a fait toutes ses classes en Espagne à Hercules avant d’intégrer la Massia, école de formation de l’équipe Blaugrana. Et, lorsqu’il a obtenu la nationalité espagnole, le sélectionneur de la Roja, Luis Enrique a tenté de le convoquer pour l’intégrer au sein de l’équipe d’Espagne. Il avait pourtant joué pour le Maroc au sein des équipes nationales des catégories inférieures: des moins de 15 ans aux U-17 et U-20. Il aurait pu changer de nationalité sportive à l’époque. Il ne l’a pas fait. Sage décision, son CV s’est enrichi de deux belles nouvelles lignes, demi-finaliste de la Coupe du Monde au Qatar et capitaine de l’équipe des Lionceaux Champions d’Afrique des U-23 à Rabat. Son équipe est qualifiée pour les prochains Jeux Olympiques prévus à Paris en 2024.
Lamine Yamal, c’est autre chose. On peut parler après quelques matchs de grand phénomène mondial. C’est un pur produit de l’école de Barcelone où il s’est fait connaitre très tôt. Il a 16 ans et il fait son âge, pourtant il a la maturité d’un joueur de 10 ans de plus. Excellent dribbleur, il n’en abuse jamais, excellent passeur, il choisira toujours la plus déroutante, excellent tireur, il marque souvent. On le compare déjà à Lionel Messi et bat des records de précocité qui le mettent à la une de tous les journaux spécialisés.
Depuis qu’une rumeur, reprise par la presse, est sortie annonçant qu’il serait dans la prochaine liste des convoqués pour l’équipe nationale d’Espagne, les spéculations vont bon train. Il est annoncé en Espagne selon Marca, un quotidien sportif madrilène et sa non-convocation par Walid Regragui semble aller dans ce sens. La fédération marocaine est restée muette pour le moment. Cela ne veut pas dire qu’elle ne bouge pas. Bien au contraire et Regragui vient de le confirmer en conférence de presse. C’est une vraie bataille, quoique entre fédérations amies et partenaires, que se sont livrées FRMF et RFEF. Certains craignent que son club influe sur sa décision. C’est possible mais pas pour les raisons que l’on imagine. Les grands clubs européens n’aiment pas trop les joueurs à nationalité sportive africaine, à cause des dates de la CAN qui les prive de leurs joueurs en plein mois de janvier.
L’enjeu pour les deux sélectionneurs sera de récupérer, pour leur équipe nationale et pour une quinzaine d’années, un des meilleurs joueurs de sa génération, l’héritier des plus grands.
Pour le moment Lamine Yamal a repris sa chambre au sein de l’internat de la Massia. L’internat était fermé pour travaux et il était reparti s’installer chez ses parents. Ce retour a fait jaser. Il a été interprété comme un acte de pression orchestré par le Barça pour choisir l’Espagne. Il n’en est rien! Lamine a besoin d’un environnement sportif, d’un suivi quotidien, médical, nutritionnel, physique et mental. C’est pour ça qu’il s’est installé à nouveau à l’internat.
Quel que soit le choix qu’il fera dans l’immédiat, il pourra le changer plus tard avec sa majorité, à condition de ne pas participer à plus de 3 matchs et d’accepter de ne plus jouer en équipe nationale pendant 3 ans. C’est le règlement.
Il va subir une sacrée pression pour le choix d’une nationalité sportive mais aussi pour sa carrière. Son statut de mineur fragilise également son lien avec le Barça. Le club ne peut pas lui faire signer un contrat supérieur à trois ans et la clause de sortie ne peut pas être supérieure à 50 millions d’euros. Ça veut dire que n’importe quel club peut verser le montant de cette clause libératoire et lui faire signer un nouveau contrat. A condition que le joueur accepte bien entendu.
Sans risque de se tromper, on peut prédire que l’on n’a pas fini d’entendre parler de Lamine, sur le terrain, c’est ce qui nous intéresse mais aussi sur les réseaux sociaux. Il n’est pas très actif pour le moment mais ça ne saurait tarder.