N’Djamena–Kousséri: la course qui efface les frontières

Aziz Daouda. khadija Sabbar / Le360

ChroniqueQuand les frontières s’effacent, il reste l’essentiel: l’humain. Le semi-marathon entre N’Djamena et Kousséri incarne la puissance du sport comme vecteur de paix et de rapprochement.

Le 23/08/2025 à 12h18

En septembre prochain, plus précisément le 6 du mois, une course de semi-marathon exceptionnelle réunira les populations de Kousséri, au Cameroun, et de N’Djamena, capitale du Tchad. Les athlètes prendront le départ devant la municipalité de N’Djamena pour rallier la mairie de Kousséri, franchissant la frontière entre les deux pays sans contrôle ni arrêt à un quelconque poste douanier. Bien au contraire, les autorités des deux États collaborent afin que les coureurs soient encadrés et sécurisés des deux côtés dans les meilleures conditions possibles. C’est déjà la troisième édition de cette course au caractère inédit.

Ce rendez-vous sportif, largement soutenu par la Confédération Africaine d’Athlétisme, dépasse le cadre d’une simple compétition. Il incarne un puissant symbole de rapprochement et de réunification des peuples d’Afrique centrale, mettant en lumière la dimension humaine profonde d’une telle initiative. En effet, les populations des deux côtés de la frontière partagent tant de choses en commun que cette ligne administrative, héritage du colonialisme, ne peut les séparer.

La force du sport comme vecteur d’unité est un slogan que l’on répète à chaque occasion. Mais combien d’événements sportifs parviennent réellement à l’incarner avec autant d’évidence que cette course unique au monde ?

Le sport, par sa nature universelle, possède le rare pouvoir de transcender les barrières culturelles, politiques et sociales. Mais ici, il ne se limite pas à l’image : il franchit littéralement une frontière.

Dans la région frontalière entre le Cameroun et le Tchad, vit un seul et même peuple. Les aléas de l’histoire en ont fait deux populations appartenant à deux pays distincts. Pourtant, de part et d’autre de la frontière, les habitants partagent la même histoire, les mêmes traditions, les mêmes défis. Dans ce contexte, qui n’est pas particulier à l’Afrique centrale, ce semi-marathon devient bien plus qu’un défi d’endurance. Il se présente comme un pont entre des communautés séparées par des frontières artificielles héritées du passé colonial.

Courir ensemble à travers ces espaces qui relient deux villes voisines, c’est exprimer la volonté de dépasser les divisions historiques. Chaque foulée devient une invitation à la solidarité, à la compréhension mutuelle et à la célébration de valeurs universelles: respect, fraternité, paix.

Kousséri et N’Djamena, bien que géographiquement proches, ont souvent été éloignées par des tensions politiques ou des différences administratives. Mais sur le parcours de cette course, ces différences s’effacent. Les coureurs, qu’ils soient amateurs ou professionnels, venus d’ici ou d’ailleurs, puisqu’il s’agit d’une compétition internationale, partagent un même objectif: avancer ensemble.

Cette initiative sportive favorise aussi la rencontre entre communautés, familles, jeunes, leaders locaux et acteurs institutionnels des deux pays. Elle encourage les échanges culturels, économiques et sociaux, et ouvre la voie à des partenariats plus durables, porteurs de stabilité régionale.

Ce semi-marathon délivre un véritable message d’espoir pour la paix et la réconciliation. Un message que l’ONU pourrait citer en exemple, face à ceux qui dilapident des fortunes dans des conflits sans fin. Les contre-exemples sont innombrables, mais ici, au cœur de l’Afrique, se lève une initiative porteuse d’espérance.

La course Kousséri–N’Djamena envoie un signal clair et inspirant : malgré les frontières et les différences, il est possible de bâtir des ponts humains, de consolider une paix durable fondée sur la connaissance mutuelle et la coopération.

Dans un monde où les conflits ethniques et politiques fragmentent les peuples, de tels rassemblements sportifs illustrent la force du dialogue et du rapprochement. Ils expriment un humanisme profond, où chaque pas posé au sol devient un pas vers la fraternisation, vers le rapprochement, vers un avenir partagé.

Au-delà de la performance athlétique, le semi-marathon du 6 septembre entre N’Djamena et Kousséri est une véritable célébration de l’unité humaine. En rassemblant des peuples aux origines proches mais parfois divisés, il nous invite à réfléchir sur notre capacité à dépasser les frontières pour privilégier ce qui devrait toujours nous unir : la fraternité, la paix et l’espoir d’un monde meilleur.

La dimension humaine du rapprochement et de la réunification des peuples trouve, dans le semi-marathon N’Djamena–Kousséri, Pont de l’Espoir, une incarnation exemplaire.

Par Aziz Daouda
Le 23/08/2025 à 12h18