Un communiqué laconique de l’instance faitière du foot africain annonçait «la bonne nouvelle». Les clubs engagés lors du tour préliminaire devaient percevoir un prize money de 500.000 dollars américains. Une somme appelée à soulager les finances des entités les moins nanties. Mais visiblement ceux qui ont chiffré le manque à gagner à cette somme vivent dans un autre monde. Ces messieurs et dames qui vivent au Caire et qui bénéficient d’un statut diplomatique, ne connaissent-ils pas le coût des voyages intra-africains? Ne savent-ils pas que ce montant ne couvre même pas les frais d’avion pour Niamey, Lagos ou Abidjan? Eh oui, imaginez le Raja, l’AS FAR ou Touarga sans le soutien financier de la FRMF qui prend très souvent à sa charge les frais de billetterie ou de location des vols charters des représentants du Royaume. Ces gens-là qui vivent dans leur tour d’Ivoire, et qui ne se déplacent jamais en classe éco dans des vols réguliers comprennent-ils les difficultés des clubs les plus modestes pour tenir leur rang, et au moins faire le déplacement quitte à être éliminés dès leur baptême du feu dans la compétition?
Passons outre cette anomalie. Et faisons un focus relatif au format des compétitions. Est-il concevable de ne pas emboiter le pas à l’UEFA et l’AFC qui ont choisi de mieux packager leurs compétitions phares? Ces dernières ont depuis longtemps instauré le système des têtes de séries, évitant aux pays les mieux classés à leur indice cette purge des tours préliminaires. Barcelone, Milan ou Manchester sont directement admis dans la phase de groupes. Idem en Asie pour les représentants des nations majeures comme l’Arabie Saoudite, le Japon, la Corée du Sud ou les Emirats. A notre échelle, le Maroc, l’Egypte, l’Afrique du Sud ou la Tunisie devaient obtenir cet avantage. C’est une question de méritocratie, que la CAF ignore superbement. On en est encore à ces deux tours préliminaires, à ce tirage au sort intégral et au système égalitaire qui tend au populisme ou à la démagogie. L’objectif est de ne fâcher personne, et à force d’avoir cette visée on finit par mécontenter tout le monde.
Est-on conscient à la CAF qu’il faut vendre un meilleur produit notamment via les droits TV. Le candidat Motsepe en parlait pendant sa campagne électorale. Il évoquait, il y a 3 ans, l’interdiction des matchs retransmis à 14h, l’instauration de la VAR dès la phase de groupes, et envisageait un plan Marshall pour les installations sportives. Mais les promesses n’engagent que ceux qui y croient, et nous avons fait partie de cette majorité de fans qui ont cru au vent du changement. Et pourtant, aujourd’hui, l’heure est au statut quo qui tue. Les matchs sont souvent programmés à des heures impossibles pour tout être humain, sous la canicule et l’humidité. La VAR est sous utilisée, et plusieurs pays sont incapables de recevoir dans leurs terrains respectifs. Du coup les droits TV n’ont pas augmenté, même si la Confédération a essayé d’instaurer l’African Football League histoire d’augmenter ses recettes, et de donner une nouvelle dynamique au foot des clubs. Cette fausse bonne idée a eu lieu en plein championnats, à un rythme qui a mis sur les rotules les équipes pour un retour sur image frôlant le néant.
Enfin, dans ce cahier de doléances, la CAF manque souvent, par calcul politicien, de fermeté. L’histoire du bras de fer entre la RSB et les autorités algériennes en est la dernière illustration. Ce feuilleton, que les fans du monde entier ont suivi avec intérêt, n’a toujours pas connu son épilogue faute de décision, ou de sanction à l’encontre de l’USMA et de la FAF de la part de la commission de discipline. Cet impair n’est que le dernier épisode des offenses faites par nos chers voisins par rapport à la réglementation de l’instance présidée par le Dr Motsepe. On pourrait d’ailleurs rappeler le feuilleton du CHAN en Algérie, du discours du petit fils de Mandela ou d’autres camouflets infligés par le régime des caporaux à l’esprit sportif.
Dans cette affaire vieille de 5 mois, la CAF a décidé de ne rien décider. Et pourtant le risque est grand d’avoir des derbies entre clubs marocains et algériens avec la même équation: nos clubs jouant avec des maillots comprenant la carte intégrale du Maroc Vs une opposition quasi pavlovienne des autorités algériennes. Cet exemple illustre l’incapacité de l’exécutif (Président, SG) et des commissions juridiques à trancher et à faire appliquer de manière ferme sa propre législation.
Et en attendant Godot, pardon la CAF, nos clubs ont repris leur bâton de pèlerin en connaissance de cause. Souhaitons qu’ils puissent faire honneur à leurs supporters, et qu’ils fassent ainsi fi du laxisme d’une instance sclérosée sans vision prospective, et qui se complait dans sa zone de confort.