Mais que se passe-t-il avec les fans du Raja? Ou plutôt, que se passe-t-il avec ses dirigeants? Ce club historique est en train de vivre un véritable psychodrame depuis que son ancien joueur Zakaria El Habti a décidé de jouer pour l’AS FAR.
Certes, le choix du joueur n’est peut-être pas totalement innocent. Certes, il n’aurait pas dû provoquer le public lors du dernier Classico. Certes, il a proféré des insultes dont il aurait pu se passer. Mais de là à faire de lui un pseudo-criminel, un traître, coupable d’avoir porté atteinte à l’honneur et à l’image du Raja? Il y a quelque chose d’excessif et de malsain dans cette attitude.
L’honneur rajaoui est-il si fragile qu’il tient au choix de carrière d’un ex-joueur? L’image du club casablancais est-elle suspendue au maillot porté par un de ses indésirables? Si tel est le cas, le club de feu Abdelmajid Dolmy est tombé bien bas.
Pour comprendre tout cet acharnement, un petit retour en arrière s’impose.
Nous sommes le 11 juin 2023, jour de la finale retour de la Ligue des Champions Wydad-Ahly. Zakaria El Habti, alors joueur du Raja, a été filmé aux portes du complexe sportif Mohammed V, essayant de rentrer avec certains membres de sa famille pour suivre ce choc.
La vidéo, rapidement devenue virale, a soulevé un tollé parmi les composantes du RCA. Le joueur a été envoyé en équipe réserve, avant de voir son contrat rompu au terme de la saison.
Libre de tout engagement, il rejoint l’AS FAR, le lundi 28 août 2023. Hasard du calendrier, son premier match coïncide avec le Classico Raja-AS FAR.
Pour lancer les hostilités, certaines pages de supporters des Verts publient des posts incitant les fans présents au stade dimanche dernier à faire vivre l’enfer à leur ancien joueur.
Et ce qui devait arriver arriva. Mis sous pression, fragilisé, El Habti a commis une faute. Après avoir offert le nul à son nouveau club, tout à sa joie, il enlève son maillot, puis le tend vers les supporters du Raja. Résultat: une pluie d’objets s’abat sur l’attaquant qui, jusqu’à un passé très proche, faisait la joie des fans des Verts.
Fin de l’histoire? Loin de là. Pour être définitivement nommé acteur central de ce triste Classico, El Habti prend un second jaune et quitte le terrain. En route pour le tunnel menant aux vestiaires, le porte-parole du Raja et membre de la Ligue nationale de football professionnel (LNFP) Abdelilah Ibrahimi le suit et lui crache au visage. Un geste obscène et indigne.
Mais visiblement, être dirigeant de football au Maroc procure à certains un sentiment de totale impunité qui leur fait croire, à tort, que tout leur est permis et que tout leur est dû.
Anéanti, El Habti a quitté le terrain dans un état d’hystérie. À partir de ce moment-là, l’issue de la rencontre est devenue anecdotique. L’urgence était dans les vestiaires, où le soldat El Habti devait être plongé dans la pire des détresses. Quelqu’un l’y a-t-il rejoint? Nous l’espérons.
On s’en doute, l’épisode va laisser des traces dans le mental du jeune, au demeurant l'un des plus prometteurs de la Botola. La logique voudrait qu’en plus de son club, les autres écuries du championnat national fassent montre de solidarité, et de la manière la plus officielle qui soit. Que dirigeants et joueurs publient des posts sur les réseaux sociaux et s’adressent aux médias pour manifester leur soutien à El Habti. Hormis l’AS FAR, personne n’a bougé le petit doigt.
Ce mardi, la Commission d'éthique de la Fédération royale marocaine de football (FRMF) va se réunir pour trancher dans cette affaire. En attendant, on espère que des communiqués de soutien estampillés LNFP et autres institutions tombent dans le mail de la rédaction.
