La CAN 2025, motivations sportives ou politiques?

La réunion du comité exécutif de la CAF, qui devra désigner le pays organisateur de la 35e édition de la CAN, vient d’être reportée d’après M. Motsepe, son président. Selon ses dires, la commission souhaite bénéficier de plus de temps pour étudier les dossiers de candidature.

En fait, et sauf grosse surprise, ce sera soit le Maroc soit l’Algérie qui organisera la Coupe d’Afrique des nations 2025. Au-delà de la rivalité entre les deux pays, ce sont deux projets qui vont s’opposer: un projet éminemment politique et un autre qui s’inscrit dans une logique globale de développement du sport, de coopération interafricaine, de tourisme régional et de découverte culturelle. L’état algérien a lourdement investi ces deux dernières années pour disposer d’infrastructures sportives à la hauteur d’un tel événement. En soi, cette débauche de moyens pour s’assurer l’organisation de l’événement sportif le plus important du continent est une bonne chose qu’il faut savoir saluer avec fairplay. La rivalité, lorsqu’elle génère émulation et compétitivité, crée de la valeur pour tous, encore faut-il que la démarche s’inscrive dans une logique globale! Ce n’est pas vraiment le cas. 

En ce qui concerne le Maroc, la promotion du football, via l’organisation de compétitions internationales et sa professionnalisation, est une préoccupation constante des autorités.

Elles ont déployé une vraie stratégie de développement en dotant le football marocain d’équipements de très haut niveau, d’une politique ambitieuse de formation, de la vulgarisation de la pratique du football et de la mise en place d’une coopération Sud-Sud prometteuse.

On peut noter, à cet égard, la création de l’Académie Mohammed VI pour la formation des joueurs et des formateurs, dont l’objectif principal est de réduire la dépendance aux joueurs formés à l’étranger et d’améliorer l’offre de la Botola.  Le Complexe Mohammed VI de football de Maamora, un centre sportif ultra moderne équipé des meilleurs outils de préparation pour les équipes. La multiplication des terrains de proximité dans tout le pays. La construction de stades modernes aux normes de la FIFA n’est au final qu’une partie marginale de cette stratégie, même si c’est la plus visible.

En réalité, organiser la CAN n’est pas l’objectif ultime. Il s’agit de réussir l’accueil de 24 délégations, leurs supporters, leurs fans zones, leurs événements culturels, et de mettre en place tous les moyens de rapprochement entre les peuples du continent. C’est le vrai défi d’une telle compétition.

Pour l’atteindre, le Maroc pourra capitaliser sur l’expérience Mawazine, qui reviendra en 2024, sur l’esprit des festivals de Fès et d’Essaouira, etc. Sur ce registre, la renommée du Maroc à l’international n’est plus à faire.

En plus du volet culturel et festif, la CAN 2025 intègre un volet promotion du tourisme intercontinental. L’ouverture sans précédent des frontières aux visiteurs en provenance des pays participants, prévue dans le cahier des charges, doit avoir une suite. Ceux qui vont venir pour accompagner leurs équipes nationales doivent être convaincus de revenir en famille pour du shopping, pour du tourisme spirituel…

La multiplication des Malls avec toutes les franchises, un peu partout au Maroc, l’augmentation de la capacité d’hébergement et la multiplication des vols interafricains par RAM sont autant d’arguments en faveur de cette promotion touristique. Les politiques restrictives développées en Europe en matière de visa en sont d’autres.

En réalité, le Maroc vise la consolidation des rapports de coopération Sud-Sud. Ce sont des objectifs nobles au service du continent et de son développement.

Organiser un tel événement peut aussi servir d’autres intérêts. Les médias officiels du concurrent algérien ne s’en cachent pas. La désignation de leur pays marquera le retour en force de leur diplomatie sur la scène africaine. Au regard de la CAN et du football africain, c’est très faible comme ambition. Qu’en pensent les responsables de la CAF? On le saura bientôt.

L’Afrique a pris un tel retard sportif qu’elle ne peut plus s’offrir le luxe de servir d’autres desseins. On le sait, les dirigeants sportifs en Afrique, tout comme les hommes politiques africains, peuvent -parfois- être tenus par d’autres agendas.