Passionné du jeu d'échecs et respecté en Liga pour son goût du beau football inspiré des préceptes de Johan Cruyff, Enrique "Quique" Setién (61 ans) est un entraîneur quasi-inconnu hors d'Espagne, bombardé lundi sur le banc du FC Barcelone après avoir fait briller des équipes modestes.
Le nouveau coach du Barça manque de références européennes, mais a gagné une notoriété depuis 20 ans en Espagne, avec notamment son excellente campagne 2017-2018 au Betis Séville et le beau jeu tourné vers l'offensive pratiqué par les Andalous cette année-là.
De quoi lui trouver des liens avec le fameux "tiki-taka" catalan, ce jeu de passes au sol et de possession qui a fait la gloire du club blaugrana sous l'âge d'or de Pep Guardiola (2008-2012), lui-même inspiré des principes édictés par Cruyff.
"Il existe un fil qui relie Guardiola à Setien", avait confié Marc Bartra, défenseur passé par le Barça et le Betis, en septembre 2018 au journal El Pais. "Dans ce Betis (de Setién), j'ai retrouvé l'entraînement que je suivais avec Guardiola et Luis Enrique", avait-il ajouté.
Esthète, Setién lui-même a dit admirer le jeu catalan, en particulier le jeu du sextuple Ballon d'Or Lionel Messi.
"C'est un luxe d'avoir pu connaître Messi et de pouvoir le voir jouer chaque semaine. A lui seul, il débloque presque tous les matches. Son dernier but, j'avais l'impression qu'on jouait sur PlayStation!", avait encensé le technicien après un revers 4-1 encaissé à domicile contre le Barça, le 17 mars 2019.
Ce soir-là, Sergio Busquets, milieu du club catalan, lui avait offert son maillot, dédicacé avec ce petit mot: "Pour Quique, avec mon admiration pour ta manière de voir le football".
Né à Santander, où il a commencé sa carrière de joueur professionnel (en 1977) et sa carrière d'entraîneur professionnel (en 2001), Setién a mûri sa science du football comme milieu de terrain à l'Atlético de Madrid (1985-1988), Logroño (1988-1992), Santander (1977-1985, puis 1992-1996) et Levante (1996). Ses meilleures années le conduiront jusqu'à la Coupe du monde 1986 au Mexique avec la Roja (3 sélections).
"J'ai essayé de faire ce qu'on me demandait, mais ça ne m'a pas réussi. Donc j'ai essayé de rester libre sur le terrain, de jouer mon football. C'est quand j'ai vu jouer le Barça de Cruyff que j'ai réellement commencé à comprendre comment les choses fonctionnaient. J'ai beaucoup appris avec eux", détaillait Setién à la première personne, dans une tribune publiée par Marca, en mai 2018.
Comme entraîneur, Setién a bourlingué sur les bancs espagnols, passant par six clubs en presque 20 ans de métier, dont Santander (2001-2002), El Ejido (2003-2004), Logroño (2007-2008), Lugo (2009-2015), et Las Palmas (2015-2017). Et même une pige comme sélectionneur de Guinée équatoriale, en 2006-2007.
Au Betis, après une saison 2017-2018 magique, le jeu prôné par "Quique" Setién n'a pas porté ses fruits lors de l'exercice suivant, avec une défense souvent aux abois... ce qui a poussé la formation andalouse à se séparer de lui en mai 2019, un an avant la fin de son contrat.
En novembre 2018, Setien est devenu le seul entraîneur depuis 10 ans à avoir battu le Barça au Camp Nou (4-3) et le Real Madrid à Santiago-Bernabeu (0-1 en septembre 2017). Et il a réussi à hisser le Betis jusqu'à une 6e place en Liga, synonyme de qualification pour la Ligue Europa.
Mais l'expérience européenne tournera court, et le Betis chutera dès les 16es de finale contre Rennes (3-3, 1-3). La seule tâche dans le CV de ce tacticien de Cantabrie passionné par la pratique des échecs, qui devra désormais trouver les solutions pour imprimer son idéal footballistique à un Barça qui espère retrouver son ADN.
Aura-t-il les épaules pour gérer un vestiaire rempli de stars ? Aura-t-il les clés pour redonner de l'allant à une attaque blaugrana privée de Luis Saurez jusqu'en mai (opéré du genou droit) et d'Ousmane Dembélé jusqu'à fin février (blessé à la cuisse droite) ?
Avant le Clásico retour de Liga qui se profile le 1er mars à Santiago-Bernabeu contre le Real Madrid, SetiÉn devra avoir pleinement endossé son nouveau costume pour le 8e de finale de Ligue des champions, sa première en C1, contre Naples le 25 février... Histoire de se faire un nom sur la planète football.