Pour sa première vraie sortie médiatique depuis la CAN, Walid Regragui a fait du Walid Regragui. Face aux questions timides de nos confrères d’Arryadia, le sélectionneur national a déroulé.
Il a défendu ses joueurs et ses choix. Peut-être un peu trop. Derrière la sincérité du discours, on sent une pointe de désarroi. Le problème vient de là: Regragui ne semble pas comprendre ce qui n’a pas marché. Il est comme ce médecin consciencieux, qui vous dit alors que vous vous tordez de douleur: je vous ai bien examiné, vous n’avez rien.
Alors de deux choses l’une: ou bien le médecin n’a pas bien fait son boulot, malgré son assurance qui n’est pas feinte. Et dans ce cas, l’absence de remise en cause pose problème. Ou bien, et cela semble être le cas de notre «médecin»: il n’arrive pas à établir le bon diagnostic. D’où ce sentiment de malaise, voire de désarroi, que l’on peut avoir face aux explications du sélectionneur marocain.
Plusieurs fois, Regragui répète la formule: «j’assume mes erreurs». En face, hélas, le journaliste ne saisit pas la perche. Alors on va demander ici à Regragui: quelles sont ces erreurs?
Le malaise devient plus gênant quand, à propos du penalty manqué par Hakimi (en huitième), le sélectionneur nous dit qu’il préfère voir Hakimi louper son tir au but face à l’Afrique du Sud que face à l’Espagne (référence au quart de finale gagné par le Maroc face à l’Espagne, lors du dernier Mondial). Ce discours est maladroit, parce qu’il sous-entend que le Mondial compte davantage que la CAN. Et cela contredit Regragui lui-même qui claironnait, après le Mondial du Qatar, que le Maroc doit d’abord affirmer sa suprématie sur la scène africaine.
On va encore titiller le sélectionneur national sur un point: le fameux huitième perdu face à l’Afrique du Sud. D’après lui, toutes les stat’ du match abondent en faveur du Maroc, qui devait logiquement l’emporter. Il faut croire que tout le monde n’a pas vu le même match.
En réalité, la possession a été équilibrée et les Bafana Bafana ont cadré plus que les Lions (3 contre 2). Et la première vraie occasion de but a été sud-africaine (frappe lointaine de Mokoena, difficilement détournée par Bounou). Sur ce match, il faut avoir la lucidité de le dire, c’est la meilleure équipe sur le terrain qui l’a emporté. L’adjectif «meilleure» est à considérer dans tous les aspects du jeu, au-delà du talent intrinsèque des joueurs: concentration, cohésion, organisation, dispositif tactique…
Il est évident, aussi, que le coaching du coach national a été défaillant. Comment comprendre, par exemple, l’alignement de deux garçons, En-Nesyri et El Kaâbi, qui ne savent pas jouer ensemble?
Bref, avant de tourner la page de la CAN, il faut la lire avec lucidité et sans affect. Docteur Regragui doit faire le bon diagnostic. Les dirigeants du football marocain aussi. Si les Lions se sont loupés, ce n’est pas seulement à cause du climat ou du manque de réussite.
En choisissant de continuer à la tête de la sélection, Walid Regragui, dont le crédit reste important, sait qu’il ne peut pas faire l’économie d’une analyse froide et d’un vrai exercice d’auto-critique. Quelque chose qui va bien au-delà des «explications» livrées à nos confrères d’Arryadia. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.