Et voilà: la guerre Vahid Halilhodzic-Hakim Ziyech est enfin terminée. Oui, le mot guerre n’est pas exagéré. Depuis l’été dernier, il a été question de beaucoup de choses, mais très peu de football. Le peuple footeux se pourléchait pourtant les babines à l’idée de revoir le milieu de terrain de Chelsea sous le maillot de l’équipe nationale. Las. Il n’a eu droit qu’à une série de batailles, de coups bas, de pleurnicheries et de déclarations ridicules. Cette histoire commençait à ressembler à la programmation nocturne de la RTM d’antan, c’est-à-dire des rediffusions de films majeurs, âgés d’au moins 18 ans. Et vous y arrivez, vous, à revoir le même film une fois par semaine pendant des mois?
Pourtant, c’est ce qu’endurait le public marocain. Le scénario ne change jamais: le sélectionneur des Lions de l’Atlas débarque en conférence de presse, donne sa liste, parle très fort, question de martyriser les journalistes en face et gagne. Voilà, c’est tout. Et en guise de générique de fin, il nous ressort la même phrase: personne n’est au-dessus de l’équipe nationale. Pfff... Il n’en a pas marre.
Remarquez, on critique Halilhodzic, mais le pauvre gars (c’est une image, le gars n’est pas pauvre du tout) n’est pas le seul à jouer aux rediffs.
Ziyech, le problème avec lui –et c’est ce qu’il y a de plus agaçant– c’est qu’il est irréprochable. Un peu trop à mon goût. Non seulement il joue très bien au ballon, gagne plein de matchs et de titres, mais en plus il est gentil, poli, bien coiffé et aime sa famille. Vous vous rendez compte, il ne pète jamais les plombs! En un mot, il est exemplaire.
C’est, en tout cas, l’image qu’il donne. Parce qu’en réalité, les deux hommes, que ce soit l’entraîneur ou le joueur, sont de grands mythos.
Le premier, devant la pression des supporters marocains, les pauvres (là, c’est presque vrai), qui scandaient le nom du milieu de terrain à chaque fois qu’il se rendait dans un des stades du pays, nous sort une révélation abracadabrante: «Moi, je veux qu’il revienne. C’est lui qui ne veut pas», a déclaré le sélectionneur national sans sourciller.
Voici, pour rappel, ce que coach Vahid avait déclaré au sujet de Ziyech, lors de la conférence de presse où il a annoncé sa liste pour la CAN 2021: «La notion de groupe, c'est quelque chose de très fragile. (…) On a bien travaillé avec ce groupe pendant deux ans, et je ne permettrai à personne de venir gâcher tout ça. L'équipe nationale, c'est sacré… On n’a pas le même chemin».
Si on soumettait le franco-bosniaque à un test de détecteur de mensonges, le polygraphe pourrait exploser.
Idem pour Ziyech, qui ne communique que très rarement via son compte Instagram en postant des messages énigmatiques. Mais, dimanche 13 mars, l’ancien de l’Ajax a publié un long message dans lequel il explique les raisons de son refus de rejoindre l’équipe nationale, quelques heures seulement après que Fouzi Lekjaa, président de la Fédération royale marocaine de football (FRMF), a annoncé son retour en sélection.
«J'aime mon pays et jouer pour l'équipe nationale marocaine a été l'honneur de ma vie. C’est donc avec une grande tristesse que je dois annoncer que, bien que le président de la FRMF ait confirmé aujourd'hui que je serai présélectionné pour l'équipe, je ne reviendrai pas jouer pour le Maroc. Je suis désolé de décevoir les fans, ce n'était pas une décision facile à prendre, mais malheureusement, je n'ai pas d'autre choix. Bien que j'aie tout donné à l'équipe au cours des 6 dernières années et que je l'aie soutenue toute ma vie, je n'ai pas le choix. Les dirigeants continuent de diffuser des informations erronées sur moi et mon engagement envers mon pays. Leurs actions ont rendu impossible pour moi de continuer à faire partie de l'équipe. J'ai appris la nouvelle de la présélection en même temps que tout le monde, ainsi je publie cette déclaration pour m'assurer que vous entendez la vérité directement de moi», a écrit le joueur.
Selon Ziyech, personne ne l’a averti d’une convocation pour les prochains matchs des Lions de l’Atlas contre la RDC dans le cadre des barrages de la Coupe du Monde 2022. Cependant, la FRMF, conformément aux règlements de la FIFA, avait envoyé un courrier à son club, le 3 mars dernier, lui demandant de libérer le joueur lors de la prochaine fenêtre internationale. Mieux encore, le club londonien a accusé réception.
Faut-il à en vouloir à Vahid Halilhodzic et à Hakim Ziyech de passer leurs égos ou leurs intérêts personnels avant les intérêts de l’équipe nationale? Ce qui attriste vraiment, c’est qu’ils ne sont pas les seuls à le faire. Nombre de joueurs et d’entraîneurs agissent de la même manière. Et là, c’est bien plus grave que des lignes sur une story Instagram ou une déclaration lors d’une conférence de presse.