Il y a des dates qui marquent l’histoire d’un pays. 1975 en est une. Cette année-là, le Maroc, porté par des légendes comme Ahmed Faras, Mohamed Baba ou Redouane Guezzar, soulevait sa première et unique Coupe d’Afrique des Nations. Cinquante ans plus tard, cette victoire reste gravée dans la mémoire collective comme un moment de gloire éternel, mais aussi comme un fardeau: celui d’une attente interminable. Depuis un demi-siècle, le Maroc a connu des espoirs déçus, des finales perdues, des éliminations cruelles. Il a vu des générations de joueurs briller sans jamais parvenir à rééditer l’exploit. Mais aujourd’hui, en ce décembre 2025, alors que la CAN s’apprête à débuter sur sa propre terre, le pays retient son souffle.
Maintenant ou jamais
La Coupe d’Afrique des Nations 2025 n’est pas un simple tournoi. C’est un acte de foi, un moment d’unité nationale, une opportunité historique de réécrire l’histoire du football marocain. Pour les Lions de l’Atlas, c’est l’occasion de mettre fin à cinquante ans de disette et d’offrir à leur peuple un deuxième sacre continental. Pour Walid Regragui, c’est le couronnement d’un travail de fond commencé il y a trois ans. Pour les joueurs, c’est la chance de leur vie: celle d’entrer dans la légende.
Quand Regragui a pris les rênes de l’équipe nationale en août 2022, peu imaginaient l’impact qu’il aurait. Ancien défenseur international, il a forgé son identité sur la rigueur, la discipline et l’unité. Son approche, souvent qualifiée de conservatrice, est en réalité profondément stratégique. Coach Walid n’est pas un révolutionnaire, mais un bâtisseur. Il sait que les grandes équipes se construisent dans la durée, avec des piliers solides et une identité claire.
On ne change pas une équipe qui gagne
Son style de management est à l’image de sa personnalité : exigeant, méthodique et protecteur. Il a choisi de ne pas tenir de conférence de presse avant l’annonce de sa liste pour la CAN. «C’est une décision personnelle, a-t-il expliqué. Je me concentre sur la compétition. Ce qui m’importe, c’est de donner la liste et de vite me focaliser sur le rassemblement». Derrière cette apparente froideur se cache une volonté de protéger son groupe. «Parler beaucoup aujourd’hui ne m’intéressait pas. Pendant la compétition, il y aura des conférences de presse. Là, je veux que l’équipe reste concentrée».
Regragui assume ses choix, même les plus difficiles. Sa liste de 28 joueurs, dont deux réservistes, a suscité des débats, comme toujours. Mais il ne tergiverse pas: «La liste est là. C’est notre choix, le mien et celui du staff, et on espère avoir fait la meilleure possible pour tenter de ramener le trophée». Parmi les décisions les plus commentées, on trouve la convocation de Hamza Igamane, blessé aux adducteurs. «Pour Hamza, c’est une blessure dont la durée peut évoluer, explique-t-il. On a pris le risque de l’intégrer et on espère que pendant la compétition, il pourra nous aider». Un risque calculé, typique de la philosophie de Regragui: tout pour la victoire.
Une génération dorée, entre expérience et jeunesse
L’équipe que Regragui a construite pour la CAN 2025 est un mélange parfait d’expérience et de fraîcheur. D’un côté, les vétérans, ces joueurs qui ont déjà tout vécu avec le maillot national: Yassine Bounou, le gardien héroïque du Mondial 2022 ; Achraf Hakimi, le capitaine charismatique et symbole de l’abnégation marocaine ; Sofyan Amrabat, le «guerrier» du milieu de terrain ; Youssef En-Nesyri, l’attaquant fétiche, souvent critiqué mais toujours décisif quand il le faut.
Achraf Hakimi. Le360
De l’autre, les jeunes loups, ces talents qui représentent l’avenir du football marocain : Bilal El Khannouss (21 ans), Ilias Akhomach (21 ans), Abdelhamid Aït Boudlal (19 ans), Eliess Ben Seghir (19 ans).
Ce mélange générationnel est la force de cette équipe. «On a 50% de l’effectif qui a moins de 30 ans, souligne Regragui. Pour la Coupe du monde 2030, on prépare l’avenir, mais on est aussi concentrés sur le présent».
18 victoires d’affilée, un record mondial
Depuis juillet 2024, le Maroc est invaincu. Dix-huit victoires consécutives, un record mondial égalé puis battu, qui témoigne d’une dynamique exceptionnelle. De la Zambie au Congo, en passant par la Tunisie et l’Ouganda, les Lions ont tout balayé sur leur passage. « On a une identité de jeu claire : pression haute, transitions rapides, jeu collectif, explique Regragui. On ne dépend pas d’un seul joueur ».
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Parmi les matchs qui ont marqué les esprits, on retient surtout le Maroc 7-0 Lesotho (octobre 2025), un récital offensif, ou encore le Maroc 4-0 Ouganda (novembre 2025), dernier test avant la CAN, où les Lions ont confirmé leur suprématie. «On aborde la CAN avec sérénité, déclare Amrabat. On sait qu’on peut battre n’importe qui».
Cette série de victoires a forgé une confiance à toute épreuve. «Jouer devant nos supporters, c’est une arme supplémentaire, confie Hakimi. En 2022, on a tenu sous pression. Là, ce sera encore plus fort».
Un parcours semé d’embûches
Le tirage au sort n’a pas été clément pour les Lions. Leur groupe, composé des Comores, du Mali et de la Zambie, est loin d’être une promenade de santé. «Aucune équipe n’est à sous-estimer, prévient Regragui».
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Le premier match, le 21 décembre contre les Comores, sera un test de concentration. Puis viendra le choc contre le Mali, le 26 décembre, un match qui pourrait être décisif pour la première place du groupe. «On contrôle notre destin, ajoute Amrabat. Mais il faudra être prêts physiquement et mentalement». Enfin, la Zambie, le 29 décembre, pour clore la phase de groupes. Au-delà du premier tour, les Lions savent qu’ils devront affronter les meilleurs du continent. Égypte, Sénégal, Nigeria, Algérie… «En CAN, tout peut arriver, rappelle Regragui. Mais on est prêts».
À la veille du coup d’envoi, Walid Regragui a un message simple pour son équipe et pour le pays: «On a tout pour gagner. Mais il faut y croire à 200%. Pas de doutes, pas de regrets. Juste du travail, de l’unité, et cette folie qui nous habite quand on joue pour ce maillot».
Pour les Lions de l’Atlas, l’heure est venue. Cinquante ans d’attente, une génération en or, un pays uni. Maintenant, il ne reste plus qu’à le faire. Pour Faras. Pour Baba. Pour tous ceux qui ont rêvé avant eux. Pour le Maroc.
LA LISTE DES CONVOQUÉS:
Gardiens de but: Yassine Bounou (Al Hilal, Arabie saoudite), Munir Mohamedi (RSB), El Mehdi Al Harrar (RCA).
Défenseurs: Achraf Hakimi (PSG, France), Abdelhamid Ait Boudlal (Rennes, France), Noussair Mazraoui (Manchester United, Angleterre), Mohamed Chibi (Pyramids, Egypte), Jawad El Yamiq (Al-Najma SC, Arabie saoudite), Nayef Aguerd (Olympique de Marseille, France), Adam Masina (Torino FC, Italie), Anass Salah-Eddine (PSV, Pays-Bas), Romain Saïss (Al-Sadd SC, Qatar).
Milieux de terrain: Azzedine Ounahi (Gérone, Espagne), Bilal El Khannouss (VfB Stuttgart, Allemagne), Ismael Saibari (PSV, Pays-Bas), Sofyan Amrabat (Betis Séville, Espagne), Neil El Aynaoui (AS Rome, Italie), Eliesse Ben Seghir (Bayer Leverkusen, Allemagne) et Oussama Targhalline (Feyenoord Rotterdam, Pays-Bas).
Attaquants: Brahim Diaz (Real Madrid, Espagne), Ilias Akhomach (Villarreal CF, Espagne), Youssef En-Nesyri (Fenerbahçe, Turquie), Ayoub El Kaabi (Olympiakos, Grèce), Abde Ezzalzouli (Betis Séville, Espagne), Chemsdine Talbi (Sunderland AFC, Angleterre) et Soufiane Rahimi (Al Ain, Emirats arabes unis).
Réservistes: Youssef Belammari (RCA) et Hamza Igamane (Lille, France).
LE PROGRAMME DES MATCHS:
Dimanche 21 décembre 2025
Maroc-Comores (20h)
Vendredi 26 décembre
Maroc-Mali (21)
Lundi 29 décembre
Maroc-Zambie (20)
LA FICHE DU MAROC:
Sélectionneur: Walid Regragui
Capitaine: Achraf Hakimi
Nombre de participations: 20
Meilleure performance: champion en 1976
Surnom: Lions de l’Atlas

























