Le Mercato 2023-2024, le rapport de force n’est heureusement pas qu’économique

Neymar lors de sa présentation au club saoudien d'Al-Hilal

Neymar lors de sa présentation au club saoudien d'Al-Hilal. DR

Il faut tout de même se souvenir que Mbappé aurait été proposé à la Saudi Pro League, la nouvelle ligue Saoudienne, et qu’il aurait refusé. L’argent ce n’est pas tout.

Le 05/09/2023 à 15h52

L’économie libérale n’a pu s’imposer comme meilleur choix politique et économique, efficace et créateur de richesses, qu’au prix d’une régulation qui préserve l’égalité des chances. Le football, une activité sportive de plus en plus professionnelle inscrite comme activité économique génératrice de valeurs, doit se donner les moyens de préserver son intégrité et sa transparence pour continuer à recruter, de plus en plus de supporters, dans les tribunes et devant leurs écrans.

Le football européen l’a compris et a mis en place un système de fairplay financier destiné à contrôler la gestion des clubs tentés par des dépenses inconsidérées, à interdire un endettement supérieur aux capacités et aux potentiels des équipes et à empêcher le dumping salarial. Il fallait protéger les clubs contre eux-mêmes et continuer à générer du spectacle. L’arrivée des clubs appartenant à des états a mis partiellement à mal ce projet.

Des fonds générés hors activités sportives ont été mis au service de certains clubs devenus artificiellement riches tout en déstabilisant le marché. Théoriquement, un club doit vivre des entrées du stade, qui sont en général liées à la notoriété du club, à son enracinement dans la ville, le quartier, à la qualité du spectacle produit, des ventes de maillots et autres gadgets, du sponsoring, et de la vente des joueurs. Il doit ensuite maitriser ses dépenses, salaires, frais de fonctionnement et coût des transferts et leurs amortissements. Les investissements et le coût de la formation ne sont pas concernés par ces règles et c’est normal.

C’est la Liga, ligue du football professionnel en Espagne, qui en a le plus profité. L’endettement des clubs espagnols ne fait plus débat, il a drastiquement baissé même si certains clubs sont mieux gérés que d’autres. Cela ne s’est pas vraiment ressenti au niveau des résultats. Le football espagnol détient le meilleur palmarès des 15 dernières années avec deux «Coupe du Monde», une masculine et une féminine, 2 titres de vainqueur de l’Euro, 8 Ligues des Champions (5 pour le Real et 3 pour Barcelone), 9 Europa League (5 pour Séville, 3 pour l’Atlético Madrid et 1 pour Villereal).

Parallèlement, la Liga ne pointe qu’à la sixième place des ligues ayant le plus investis en transferts de joueurs pour la saison 2023-2024. Avec 432 millions de dépenses pour 157 nouvelles recrues, la Liga est loin des chiffres de la Première League, en tête du classement avec 2,737 milliards d’euros. Alors que le football anglais n’est toujours pas couronné en tant que Nation même s’il réalise des résultats importants au niveau des clubs.

De même pour la Ligue 1 dont les résultats en clubs sont désastreux, ils ont pourtant dépensé beaucoup et dépensent encore, 808 millions d’euros pour l’exercice actuel. Pire, malgré une force économique attractive rare dans le football européen, le PSG n’a pas pu recruter deux des futures stars du football national français, Camavinga et Tchouaméni ont préféré le Real Madrid. Ce ne sont pas les seuls Belligham, un des nouveaux et futurs joyaux du football mondial, a résisté à toutes les importantes propositions des clubs anglais pour venir au Real. Barcelone, malgré ses difficultés économiques, connues aujourd’hui de tous, continue à séduire et a pu attirer Gundogan, Joao Cancelo, Joao Félix, passés par le football anglais et avant eux Lewandowski. Le rapport de force n’est heureusement pas qu’économique.

Le cas de Kylian Mbappé est différent et mérite un traitement à part. Il a plusieurs fois et directement manifesté son envie de venir au Real même si certains se posent la question légitime de savoir si cet intérêt était sincère ou destiné à mettre la pression sur son club pour obtenir plus de pouvoir et d’argent? En attendant la réponse, une nouvelle saison de cette série est annoncée pour juin 2024, sauf prolongement du contrat actuel entre temps.

Il faut tout de même se souvenir que Mbappé aurait été proposé à la Saudi Pro League, la nouvelle ligue Saoudienne, et qu’il aurait refusé. L’argent ce n’est pas tout.

Ceci dit cette nouvelle ligue est l’invitée surprise de la saison. Le mercato, le marché des transferts des joueurs entre clubs européens, qui s’ouvre chaque année fin juin et ferme le 1er septembre va connaitre une prolongation inattendue et inquiétante pour certains clubs fragiles économiquement. La Saudi Pro League a raflé un nombre impressionnant de vedettes habituelles de la Ligue des Champions d’Europe. En termes de dépenses, elle est classée, cette année, en deuxième position derrière la Premier League. C’est un classement provisoire, les clubs saoudiens peuvent encore payer des clauses de résiliations de certains joueurs dans le cœur de leur cible jusqu’au 21 septembre 2023. Mo Salah de Liverpool est dans le collimateur, Yannick Carrasco de l’Atlético aussi, ce ne sont pas les seuls.

José Bordelas l’entraîneur de Getafe disait, sur le sujet, à l’issue du match de son équipe face au Real: «c’est dangereux, parce que le club arrive, paie la clause, ils ont beaucoup d’argent. Nous avons tous peur qu’ils nous enlèvent des joueurs importants, surtout les équipes modestes».

Il a tout dit. Une réflexion autour d’un éventuel fairplay financier entre Ligues professionnelles doit être envisagée parce qu’en l’absence de régulation le football prends un risque.

Par Larbi Bargach
Le 05/09/2023 à 15h52