Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, l'a rappelé le 3 mai à la veille de l'annonce de la prolongation de l'Etat d'urgence: "L'Euro représentera un risque", une cible, comme ses organisateurs (l'UEFA et son bras armé le comité d'organisation, les villes hôtes et l'Etat) le savent depuis la genèse du dossier, en 2010. Et a fortiori depuis les attaques terroristes de janvier et novembre 2015. Pour répondre à cette menace, les moyens humains et financiers envisagés au départ pour sécuriser l'Euro ont été doublés.
Au total, la protection des fans-zones coûtera 24 millions d'euros (contre 12 prévus) pour rémunérer les agents de sécurité privés (de 80 à 350 simultanément selon la taille des fans-zones) et installer autour de ces enceintes, destinées à suivre les matches en direct mais également à célébrer l'événement, des équipements de sécurité et de détection: barrières, équipes cynophiles, caméras de surveillance, contrôle magnétique et souvent des portiques de détection comme à Nice, Lyon ou Bordeaux.
Sous la pression d'Alain Juppé, maire de Bordeaux et président du club des villes-hôtes, l'Etat (8 millions) et l'UEFA (4 M EUR) ont accepté de prendre en charge les 12 millions de surcoût induits par les mesures décidées après les attentats du 13 novembre 2015.
Les stades --placés sous la protection de 10 à 12.000 agents de sécurité privés engagées par l'UEFA comme les camps de base des 24 équipes et tous les sites et hôtels officiels-- disposeront eux d'un double périmètre de contrôle. Au total, le budget sécurité de l'UEFA se monte à 34 M EUR.
Enfin, l'Etat assurera la protection du reste du territoire et des transports grâce aux forces de l'ordre classiques renforcées par plus de 10.000 militaires pour un évènement "sécurisé comme jamais", selon le ministre des Sports Patrick Kanner "mais où, malgré ces 100% de précaution, il n'y aura pas de risque 0".
Le dispositif est en place. Bernard Cazeneuve du côté de l'Etat, comme Jacques Lambert, président du comité d'organisation pour l'UEFA, assurent qu'il sera optimal. "Je tiens", dit le ministre de l'Intérieur, "à ce que nous puissions, face à ce risque, disposer de l'ensemble des moyens qui nous permettent de le surmonter. (...) Nous n'allons pas renoncer à continuer à vivre comme une grande nation".
"Plus l'échéance approche", ajoute Jacques Lambert, préfet de Savoie au moment des jeux Olympiques d'Albertville en 1992, "plus on a l'impression que l'on est tendu. Ce n'est pas le cas, pas le mien. Si je connais le niveau de risque, je sais aussi ce que ça impose comme mesures à prendre. On y est prêts, sereinement."
Pour autant, des voix s'élèvent pour mettre en garde les co-organisateurs contre un possible fiasco. Ainsi Alain Bauer, président du collège du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), a réédité ses prévisions catastrophistes six mois après avoir, au lendemain du 13 novembre, appelé à la suppression des fan-zones faute de moyens humains pour les sécuriser.
"L'Etat n'a pas les moyens de se substituer aux opérateurs privés pour s'occuper des stades en plus du reste: Sentinelle, Vigipirate, les transports, les aéroports...", estimait-il en début de semaine dernière, préconisant l'emploi d'un agent de sécurité privée pour 100 supporteurs dans une fan-zone, ce qui est loin d'être le cas dans certaines villes, notamment à Paris où une fans-zone d'une jauge de 92.000 places sera installée sur le Champ de Mars sous la surveillance de 350 agents privés, sans compter les forces de l'ordre.
A l'autre extrême, la fans-zone de Lens pourra contenir 10.000 personnes comme celle de Saint-Denis. A Marseille, ils seront 80.000 sur la plage du Prado et 62.000 à Bordeaux sur la place des Quinconces.
A l'inverse, le Syndicat national des entreprises de sécurité (SNES) a appelé ses adhérents à se mobiliser pour fournir en personnels les villes demandeuses. Pour ce faire, l'Etat avait, fin 2015, mis en place une formation spécifique de 107 heures suivie jusqu'à fin mai par plus de 1.200 personnes qui n'auront aucune difficulté à trouver un premier emploi.