Le chemin sera long avant d’atteindre 2030, et le temps imparti, très court. C’est le défi majeur des prochaines années. Et il faudra le relever. Le Maroc sera au rendez-vous, personne n’en doute. Les stades seront aux normes et les moyens de transport dignes des plus grandes capitales et villes du monde.
Les hôtels et maisons d’hôtes seront prêts à accueillir les 2 ou 3 millions de touristes supplémentaires attendus pour les 45 jours du tournoi. Un mois et demi c’est la conséquence du passage à 48 équipes en phase finale et temps qui va s’écouler entre la date du match d’ouverture et celle de la finale.
Les Marocains aussi seront prêts. Tout le monde en est conscient, sauf les habituels oiseaux de mauvais augure, toujours présents lorsqu’il s’agit de critiquer et de dénigrer. Parce que les Marocains savent se mobiliser, se montrer généreux, hospitaliers et se sublimer lorsque l’enjeu est élevé. Les exemples foisonnent dans l’histoire de ce pays.
Toutefois il demeure un domaine dans lequel l’inquiétude reste vivace; elle concerne la gestion du public avec trois volets très liés les uns aux autres.
Tout d’abord, la présence des spectateurs dans les stades. Il n’y a pas pire publicité pour un organisateur que les images de stades vides. C’est pourtant un risque sérieux, et dont les premiers effets seront perceptibles, si rien n’est entrepris entre temps, dès la CAN 2025 prévue en décembre.
Ce ne sont pas les affiches attrayantes qui vont manquer.
Les équipes africaines sont séduisantes et représentent l’avenir du sport le plus populaire au monde. Pour contourner le risque des «stades vides», il faudra apprendre à attirer le public pour des matchs sans enjeux émotionnels et le fidéliser à travers des prestations dédiées à son confort visuel et opérationnel.
Ensuite, vient l’expérience du supporter dans le stade. Chaque titulaire d’un billet numéroté doit être assuré de s’installer à l’emplacement qui lui a été attribué. C’est une problématique qu’il faut absolument régler.
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Elle nécessite des mesures fortes consistant en un cocktail de discipline, d’accompagnement, de préparation et la mise en place de chemins d’accès bien conçus dédiés à orienter le flux vers les places imparties. Une mauvaise expérience «terrain» peut avoir un impact direct et négatif sur l’envie d’assister aux matchs.
Enfin, et on ne le dira jamais assez, la violence que l’on trouve chez un certain nombre d’énergumènes, donne des arguments à ceux qui militent contre le pays. Plusieurs chroniques ont été consacrées aux risques du hooliganisme, dont les acteurs sont souvent des jeunes désœuvrés. Il faudra les sanctionner mais aussi les impliquer, les responsabiliser et en faire des sujets de nos investissements sportifs. Il y va de la dynamique positive du projet Coupe du Monde.
Dans l’agenda de préparation globale du Mondial 2030, cet aspect ne figure apparemment pas parmi les priorités. On peut certes se tromper, mais l’actualité fini par rattraper les décideurs. Une décision ne passe pas, celle d’interdire la présence des supporters de l’équipe censée jouer en déplacement. Les raisons sont recevables, mais la formule choisie a prouvé son inefficacité et donne satisfaction aux perturbateurs.
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Les décideurs ont souvent choisi la formule la plus simple pour gérer le public: lui interdire l’accès. C’est une erreur; on ne combat pas le sida par l’abstinence.
L’affiche AS FAR-Raja de Casablanca est un des moments forts du football national. C’est, avec le derby casablancais et les oppositions AS FAR-Wydad, ce qui se fait de mieux historiquement au Maroc. Ce n’est pas manquer de respect aux autres clubs que de le préciser.
Ce sont des matchs attendus et préparés par le public des différents bords. Un match de football, c’est d’abord des joueurs, des tactiques et une confrontation physique. C’est aussi une ambiance, un folklore construit autour de chants et de «tifos».
Priver le spectacle d’un de ses ingrédients, les plus importants, nuit au produit. Oui, le football est un produit; ce n’est pas un hasard s’il est commercialisé et qu’il génère de plus en plus de cash.
Cette édition d’un des deux «Clásicos» à la marocaine est d’une importance cruciale. Elle a pour enjeu une qualification en quart de finale de la Ligue des Champions d’Afrique.
Elle aurait mérité une ambiance festive pour tous les supporters. En plus, l’enjeu est de mise, le match va se jouer sous le signe de la revanche: à l’aller, l’équipe r’batie a battu le Raja à Casablanca (2-0). Un score qui venait effacer les résultats de la saison dernière. Pour rappel, le Raja a battu l’AS FAR en finale de la Coupe du Trône et les a coiffés au poteau, lors des dernières journées de la Botola Pro Inwi.
C’est un mauvais signal pour les promoteurs de la Coupe du Monde 2030. Cet événement n’est pas une fin en soi mais un cap à franchir pour un avenir meilleur. Le Maroc post-Coupe du Monde, pour se limiter au sport en général et au football en particulier, se prépare dès à présent.
L’appropriation des futures infrastructures nécessite des moyens et un public responsable. C’est dans ce cadre que s’est inscrite la candidature marocaine. Ce n’est pas une candidature pour le prestige ou un quelconque leadership. Elle vise plutôt à délivrer un message de paix, de tolérance, de coexistence et de partage d’expérience utile pour les peuples de la région.
La Coupe du monde est une fête, elle se préparer en tant que telle. Et la fête, c’est un public joyeux, sportif et passionné, un ingrédient qui va manquer à une des plus belles affiches de la saison.