Un Mali pour un bien?

Brahim Diaz. AFP or licensors

ChroniqueUn nul face au Mali aura suffi à réveiller les doutes et à fragiliser une union sacrée pourtant proclamée à l’unisson avant le coup d’envoi de cette CAN.

Le 28/12/2025 à 10h10

Il aura suffi d’un match nul. Un seul. Un 1-1 face au Mali pour que l’union sacrée, patiemment construite depuis des mois, se fissure en quelques heures. Comme si le contexte, l’adversaire, l’histoire même de cette Coupe d’Afrique des Nations s’étaient soudainement évaporés.

Le Maroc a gagné face aux Comores (2-0), puis il n’a pas perdu. Et pourtant, le pays s’est réveillé avec quarante millions de sélectionneurs, de préparateurs physiques, d’analystes tactiques. Critiques à tout va, doutes précipités et procès d’intention. La CAN venait à peine de commencer que certains cherchaient déjà des coupables.

Pourtant, Walid Regragui l’avait dit, avant même le coup d’envoi de la compétition. Cette Coupe d’Afrique des Ntions ne sera pas une mince affaire. Pas parce qu’elle se joue à domicile. Pas malgré notre classement FIFA. Pas en dépit de notre statut de demi-finalistes du dernier Mondial. Mais précisément à cause de tout cela. Parce que le Maroc est attendu. Parce que le Maroc est ciblé. Parce que le Maroc est l’équipe à abattre.

Ce match face au Mali, au fond, n’est pas un accident. C’est un révélateur. Un rappel à l’ordre. Un mal nécessaire. Un mal pour un bien.

Il a peut-être dissipé certaines illusions. Celle de croire que jouer chez soi suffit. Celle de penser que l’aura du Qatar 2022 continue de produire des effets automatiques. Celle, enfin, d’imaginer qu’un statut protège de l’effort, du combat, de la souffrance. Non. En Afrique, personne ne donne rien. Surtout pas au pays hôte.

Les Lions de l’Atlas ont goûté, face aux Maliens, à l’intensité réelle de cette CAN. Engagement total. Duels incessants. Pression constante. Une équipe venue pour jouer son football, mais surtout pour faire tomber le Maroc. Comme le feront toutes les autres.

Les Lions devront donc cravacher, se battre et parfois saigner. Cette CAN ne se gagnera ni au palmarès, ni à la réputation, ni aux souvenirs glorieux. Elle se gagnera à l’usure. À la constance. À la capacité d’encaisser, de répondre, de repartir.

Et remettons les choses à leur place. Un nul face à l’autre favori du groupe n’est pas un mauvais résultat en soi. Le Sénégal, autre candidat assumé au sacre, a concédé le même score face à la RDC, équipe du chapeau 2. Et là-bas, ni le public, ni la presse n’ont réclamé la tête du sélectionneur. Personne n’a parlé de crise. Personne n’a douté du projet.

Pourquoi ce qui est toléré ailleurs deviendrait-il intolérable chez nous?

Cette CAN est longue. Très longue. Elle ne pardonne ni l’arrogance, ni la panique. Le Maroc n’a rien perdu face au Mali. Au contraire, il a gagné une certitude: rien ne lui sera offert. Et c’est peut-être la meilleure leçon à tirer, maintenant, plutôt qu’au moment où il serait trop tard.

À condition, bien sûr, que l’union sacrée ne soit pas un slogan fragile, mais une conviction profonde. À condition que le doute ne prenne jamais le pas sur la lucidité. À condition que le peuple marche avec ses Lions, même quand le chemin se fait escarpé.

Allez les Lions.

Par Adil Azeroual
Le 28/12/2025 à 10h10