Il y a une semaine, nous écrivions ici même que seule une catastrophe nucléaire pouvait empêcher Vinicius de gagner le Ballon d’or. Raté! Vini n’a pas eu le fameux B.O et ce n’est pas une catastrophe nucléaire qui l’en a privé. Mais autre chose…
La «défaite» de Vinicius ressemblera toujours à une injustice. Le joueur et ceux qui l’aiment peuvent légitimement se demander: «Mais que peut-il faire de plus?». Par le passé, d’autres joueurs ont eu le B.O pour moins que ça. Le Brésilien aurait fait un magnifique vainqueur.
De l’autre côté, la victoire de Rodri, pour surprenante qu’elle soit, n’est absolument pas un scandale. Elle est même tout le contraire parce qu’elle ouvre la porte sur autre chose. Elle semble nous dire, ou plutôt nous rappeler, que le foot est d’abord un sport collectif.
Bien sûr, dans les coulisses de l’attribution de ce Ballon d’or, beaucoup de choses ont été dites. Dans le lot, il doit certainement y avoir du faux, mais aussi du vrai. On dit, par exemple, que Vini traine une image qui déplait: trop d’engueulades sur et en dehors du terrain, trop de polémiques. Ce n’est pas le prototype du joueur lisse, qui ne dit rien qui dépasse, comme pouvaient l’être un Pelé ou même un Messi. Ses prises de position contre le racisme, notamment, ont dû agacer les dirigeants du foot, même en Espagne. Quand on les sépare de leur contexte, ces sorties qui sont tout à fait légitimes, voire salutaires, ont certainement brouillé l’image du joueur, et ce genre de détail a pu jouer en sa défaveur lors du vote.
On peu aussi penser que la défaite de Vini est surtout celle du Real et du président Florentino Perez, que les instances voudraient punir pour son rôle dans le projet de Superligue. Encore une explication politique pour un vote-surprise.
Mais on peut très bien nous en tenir aux explications sportives, directement liées au foot et au terrain, et à rien d’autre. Rodri, on l’a dit, est un grand joueur. C’est un «cerveau», un entraineur parmi les joueurs. Un joueur tactique, donc, qui fait jouer les autres et gagner ses équipes.
Ce genre de joueur n’a que très rarement reçu la consécration suprême. Rodri est le chainon manquant entre Busquets et Iniesta, un mélange d’intelligence de jeu et de technique individuelle. Sa victoire est celle de ses entraineurs, de Diego Simeone (Rodri est un ancien de l’Atletico) et de Guardiola.
Toutes proportions gardées, la victoire de Rodri est celle d’un Dolmi contre Faras, d’un Xavi contre Messi. Dit comme ça, le vote prend du sens et semble ouvrir de nouvelles perspectives à la perception du foot, chez les joueurs et dans les écoles de formation pour commencer, mais aussi parmi tous ceux qui vont vivre le ballon rond: les supporters, les sponsors et les instances dirigeantes.
Bref, c’est tout sauf une catastrophe nucléaire!