Walid Regragui respire enfin! Son équipe vient d’enregistrer deux victoires convaincantes face à une équipe nationale centrafricaine valeureuse et joueuse. Malgré un dispositif tactique assez moyen, les Centrafricains ont eu le mérite de ne jamais fermer le jeu. Ils ont été privés de ballon et, s’ils ont reculé, c’est bien parce qu’ils n’avaient pas le choix. Ils se sont procurés quelques occasions, mais ont trouvé en face d’eux un excellent Munir Mohamedi, toujours prêt à relever les défis les plus inattendus. Ils ont même essayé de construire le jeu au détriment de la rigueur défensive qu’il aurait fallu mettre en place pour faire face à un adversaire mieux classé. Cette philosophie de jeu a ouvert des espaces aux Lions de l’Atlas, qui n’ont pas manqué l’occasion d’en profiter. L’attaque marocaine a été particulièrement prolifique, avec neuf buts marqués en deux matchs.
C’est une bonne nouvelle pour l’entraîneur national. Son indice de popularité, jadis au top, a subi une sérieuse dégradation après le parcours compliqué des Lions de l’Atlas en Côte d’Ivoire. Il n’a pu sauver sa place qu’en raison du capital sympathie énorme accumulé au Qatar. Ce n’est pas tout: l’équipe post-Coupe d’Afrique des Nations a un peu déçu, non pas en termes de résultats, mais de contenu. Le spectacle d’une équipe sur la défensive et attentiste, face à des équipes moins douées, a brouillé le message. Les Marocains ont relevé leur niveau d’exigence et ils ont bien raison: on a un statut à défendre. Il faut noter qu’au passage, une autre équipe nationale, celle des U23, a fait vibrer les supporters des équipes du Maroc. En remportant la médaille de bronze aux Jeux Olympiques, elle a montré qu’on pouvait avoir de l’ambition. Cette jeune équipe a brillé en termes de résultats, mais aussi en termes de spectacle. Elle a d’ailleurs, en raison de l’excellence démontrée, éclipsé un temps l’équipe première, qui a souffert de la comparaison. Pour Regragui, il fallait rebondir; c’est fait grâce à un effectif de premier ordre et des réajustements tactiques dont la mise en place a pris du temps. Le mérite lui revient. Il a su se remettre en question et changer d’approche. On en a eu les prémices; reste à confirmer.
Les images de la victoire du Maroc contre la Centrafrique (4-0). FRMF
Le football marocain vit ses plus belles années; un indicateur permet de le confirmer, c’est la qualité du banc de touche des Lions de l’Atlas. C’est incontestablement le meilleur banc de l’histoire du football marocain. C’est à la fois un avantage —il permet des dizaines de combinaisons— et une source de maux de tête lorsqu’il s’agit de composer un onze de départ et d’éliminer des joueurs brillants. C’est un des défis que l’entraîneur aura à surmonter lors des prochaines prestations de l’équipe nationale: un défi sous forme de puzzle qu’il faut reconstruire.
Les ingrédients sont là: le retour en forme du maestro Azzedine Ounahi, l’efficacité retrouvée du défenseur central Nayef Aguerd, le charisme du nouveau capitaine Achraf Hakimi et la maturité du brillant Abdessamad Ezzalzouli sont autant de motifs de satisfaction. Ce ne sont pas les seuls. Les médias se sont beaucoup penchés sur les prestations de certains joueurs de la Botola. Youssef Belammari et Jamal Harkass, qui malgré quelques fautes techniques se sont révélés comme de sérieuses options. Soufiane Rahimi, qui confirme son excellent parcours aux Jeux Olympiques, sans oublier ceux qui travaillent dans l’ombre et les absents qui n’ont pas encore dit leur dernier mot.
Le football, ce sont avant tout des joueurs. Sans grands joueurs, il n’y a pas de grande équipe. L’entraîneur apporte un plus incontestable par des choix judicieux et une mise en place adaptée. Le reste, ce sont les joueurs qui le réalisent.
Et il y en a un qui le fait très bien: le jeune Eliesse Ben Seghir, qui n’a que 19 ans, a particulièrement illuminé la deuxième soirée à Oujda. Sans être encore un titulaire incontestable, il fait déjà partie des vedettes de l’équipe et a montré des aptitudes largement supérieures à la moyenne. En six sélections, le jeune sociétaire de l’AS Monaco a contribué à quatre buts: il en a marqué trois, dont un doublé, et réalisé une passe décisive. Sur les six matchs auxquels il a participé, l’équipe nationale a remporté cinq victoires et enregistré un nul avec 18 buts marqués pour un seul encaissé; c’était contre la Zambie en éliminatoires de la Coupe du Monde. Ces chiffres donnent le tournis; seul Brahim Diaz peut lui être comparé avec 2 buts et 2 passes décisives en six sélections également.
Il a incontestablement les atouts pour devenir un grand du football national. En début de semaine, une information a fait le buzz sur les réseaux sociaux: interrogé sur son équipe «Adidas» de l’année, Lionel Messi a sélectionné Eliesse Ben Seghir parmi les titulaires. C’est flatteur et encourageant. Évidemment, rien n’est acquis: le choix du onze se fait par vote populaire sur les pages de l’équipementier et le vote de Messi est un vote parmi d’autres, mais c’est prometteur. Achraf Hakimi a eu ce privilège en 2022, c’est un indice important.