Rejouer au foot après ce drame, c’est dur, mais il le fallait

Minute de silence observée avant le match amical Maroc-Burkina Faso, le mardi 12 septembre à Lens.

Minute de silence observée avant le match amical Maroc-Burkina Faso, le mardi 12 septembre à Lens.. FRMF

Les Lions de l'Atlas étaient à Agadir le jour du drame. Une ville qui a eu malheureusement son lot de victimes. Ensuite, ils ont dû traverser Marrakech, une ville meurtrie, répondre à leurs proches qui se sont probablement inquiétés pour eux et replonger dans le match.

Le 14/09/2023 à 09h20

Ceux qui ne connaissent pas le peuple marocain, sa capacité de résilience, sa modestie et sa généreuse solidarité doivent absolument changer de logiciel. C’est le cas d’un certain nombre de médias étrangers dont la vision est déformée par leur idéologie, leurs intérêts politiques et leurs soi-disant principes et libertés.

Ils avaient pourtant déjà eu un avant-gout de l’esprit de corps des Marocains lorsqu’il s’agissait d’encourager les leurs. La façon d’entonner l’hymne national avant chaque match de Coupe du Monde a longtemps résonné dans leurs oreilles et marqué les esprits. La capacité de déstabiliser l’équipe adverse fait partie des ingrédients de motivation de tous les sports, en particulier en football. Ceux qui étaient face aux Lions de l’Atlas n’en sont pas toujours sorti indemnes. Personne n’a reconnu Thibaut Courtois, le gardien belge, face au Maroc, il était légèrement en deçà de ce qu’il représente, c’est pourtant l’incontestable numéro un mondial. On n’avait jamais vu Luka Modric, le Mozart du football, aussi fébrile et l’Espagne aussi stérile. Le Portugal que le Maroc a éliminé en quart de finale de la Coupe du Monde venait d’éliminer la Suisse 6-1 en huitième et l’Espagne qui avait marqué 7 buts lors du premier match face au Costa Rica n’a pas réussi à marquer un seul but contre l’équipe nationale, ni même un pénalty lors de la séance des tirs aux buts.

Personne n’enlèvera le mérite aux joueurs et à leur entraîneur, pourtant il est difficile de nier l’impact du public. Un public qui s’est plié en quatre pour soutenir les siens. Combien d’échéances sont réglées chaque mois pour financer les déplacements opérés il y a bientôt un an par des supporters soucieux d’accompagner, de soutenir et d’encourager leurs représentants en Coupe du Monde.

Après le drame du 8 septembre, le Maroc est en train de revivre le même enthousiasme. Les routes sont bondées de camions remplis à ras bords de médicaments, de vêtements, de couvertures, de lits de camps, de tentes… Tous vont en direction de Marrakech et de sa région. L’armée marocaine, la protection civile et le génie civil sont bien sûr à pied d’œuvre pour déblayer le terrain, secourir les survivants et soigner les blessés. C’est leur devoir mais sans la solidarité de leurs compatriotes, leurs efforts resteraient vains. 

Juste après le choc de la première secousse qui a détruit une part de notre patrimoine, un pan de notre histoire et brisé des centaines de familles, les Marocains ont réagi comme un seul homme. Ils se sont mis en deuil et ont commencé à se préparer pour se rendre utiles.

Le football a fait de même, le match qui devait opposer le Maroc au Libéria a été reporté, c’était pourtant un match officiel. Joueurs, staff et public ont rejoint les centres de transfusions sanguines pour donner leur sang et sont passés à la phase la plus compliquée, celle de la reprise. Quand on tombe de cheval, il faut remonter très vite pour surmonter la peur. C’est ce qu’il fallait pour les joueurs marocains.

Ceux qui ont vu le match entre le Maroc et le Burkina Faso à Lens ont retrouvé cette dynamique, cette volonté, cette énergie de faire honneur au maillot national. Ils se sont battus sur chaque balle, ont couru dans tous les sens pour mettre la pression et bloquer les espaces.

Le public a répondu massivement présent. Habillé aux couleurs nationales, il voulait montrer à quel point il se sentait concerné. La victoire des Marocains a été célébrée sobrement dans la dignité en communion avec un public discipliné venu de la région de Lens et des pays limitrophes. Dans le jeu, on a retrouvé le métronome Azzedine Ounahi, il avait un peu disparu après la Coupe du Monde, le changement de club, d’entraîneur et une méchante blessure, il revient très fort. Amine Adli, le nouveau venu a séduit et les autres ont joué leurs partitions.

Ce n’est pas le plus important. Ce qui a vraiment compté mardi soir, ce sont les ondes positives transmises à tous nos compatriotes, ceux qui souffrent dans leur chair et les autres qui endurent la perte d’un proche.

C’était important aussi de voir comment les joueurs allaient surmonter le choc psychologique. Ils étaient à Agadir le jour du drame. Une ville qui a eu malheureusement son lot de victimes. Ensuite, ils ont dû traverser Marrakech, une ville meurtrie, répondre à leurs proches qui se sont probablement inquiétés pour eux et replonger dans le match.

Dans ces conditions, rejouer au football, c’est dur, mais il fallait le faire.

Par Larbi Bargach
Le 14/09/2023 à 09h20