Botola: le centre de gravité se déplace-t-il vers l’Est?

ChroniqueSommes-nous en train d’assister à un glissement du centre de gravité du football marocain? L’axe Casa-Rabat a-t-il perdu de son lustre, après années de domination sur la Botola ? Ces questions méritent d’être posées, scrutées et analysées, tant la RSB semble partie pour remporter son premier titre de champion du Maroc de son histoire. Leaders intraitables, les représentants de la Capitale de la Clémentine cueillent les fruits d’une gestion sportive et financière des plus exemplaires.

Le 09/01/2025 à 16h45

Le supporter casablancais n’est pas content et il le manifeste à sa façon. Le Wydadi réclame une meilleure gouvernance et un mercato plus ciblé, alors que le Rajaoui revendique un nouveau leadership après le constat d’échec, lié à la gestion d’Adil Hala.

Pour la première fois depuis des lustres, les deux bords de la Capitale économique parlent de la même voix. Les aficionados réclament une gestion plus conforme à l’histoire glorieuse des deux entités, en comparaison avec le moment de plénitude que vivent leurs rivaux immédiats, notamment la RSB.

Depuis son retour dans l’élite du foot marocain en 2012, le club n’a cessé de progresser dans la hiérarchie, comme le prouvent les Coupes du Trône gagnées en 2018, 2021 et 2022. Cette croissance exponentielle a également donné des ambitions à la formation berkanie, sur le plan continental, avec deux Coupes de la Confédération (2020 et 2022), en plus d’une Super Coupe d’Afrique, glanée contre le Wydad.

Le palmarès aurait pu être bien plus conséquent, si ce n’est des deux finales de cette même compétition, perdues en 2019 et 2024, à chaque fois face au Zamalek.

Modèle de régularité en Botola depuis 6 ans, avec, quasiment à chaque fois, une place sur le podium, la régularité de la RSB suscite un peu d’envie, voire de jalousie, depuis Casablanca.

Les fanatiques rajaouis et wydadis préférant plutôt lier la success story venue de l’Oriental, à l’effet Fouzi Lekjaa, plutôt qu’aux mérites managériales des dirigeants de la RSB.

Pourtant, Berkane est un havre de stabilité et surtout de sérénité. En matière de gestion sportive, le club a souvent gardé ses entraîneurs, sans attendre de les voir remporter un titre. Les exemples les plus marquants sont Mounir Jaaouani, dans le passé, et Moïne Chaâbani actuellement.

A Berkane, on fait également preuve d’intelligence sur le mercato, où les recrutements ciblés sont préférés: Munir, Manaout et le Brésilien Barbosa, recrutés cet été. Pas de place au clinquant ou au bling-bling, pour satisfaire une poignée de supporters, mais des éléments pouvant servir d’appoint aux Dayo, Moussaoui, Labhiri, Khairi, Mellioui, Mourabit...

Sur le plan de la gouvernance, le club a su s’émanciper sans avoir systématiquement recours à la tutelle du président de la FRMF. Ce dernier, depuis sa démission en 2017, n’interfère plus dans la gestion quotidienne de l’actuel président, Hakim Ben Abdellah.

La Renaissance sportive de Berkane.

Sur le plan financier, le tour de table dans le cadre de la Société Sportive rassemble des personnalités ayant de grosses attaches avec la région et qui possèdent des entreprises reconnues sur le plan national. En matière de muscle financier la RSB a des ressources qu’ignore le casablancais ou le rbati lambda. Et très souvent, sur les réseaux sociaux, la mauvaise foi prime sur l’esprit de nuance.

Car à Casa, comme à Rabat, les supporters sont pris d’inquiétude, en assistant au changement de paradigme que vit notre football. La tendance est plus à la rigueur dans le contrôle de gestion et notamment en matière de litiges et de mercato. Les résolutions à l’amiable ne sont plus tolérées et le tour de force que voudraient exercer certains, pour faire sortir leur club de la crise, n’est plus d’actualité.

La nouvelle géographie en quête d’Histoire

Ces éléments sont de nature à redonner à l’Oriental, son 1er titre de champion du Maroc depuis celui glané par le MCO en 1975. Depuis 50 ans cette région, parfois méconnue par certains nombrilistes issus de l’axe qui a souvent remporté les les titres depuis l’indépendance, n’a eu qu’une place de dauphin à se mettre sous la dent. C’était en 1983.

Cette année-là, la bande à Hachemi Brazi, Byaz, Boushaba et Benito avait laissé échapper le sacre, au profit d’un MAS plus rodé et beaucoup plus expérimenté. 42 ans plus tard, et avec des arguments et un contexte bien différents, le club de la ville natale du mythique Hicham El Guerrouj est capable de remédier à cette anomalie. Ce serait une récompense logique par rapport aux efforts fournis depuis 12 longues années de bonne gestion et de travail acharné.

Pendant que la RSB trace son chemin, dans les cafés du commerce des grandes villes, les supporters des clubs, dits historiques, sont nostalgiques de leur passé récent. Ils montrent aussi quelques signes d’agacement, voire de jalousie, contre ce nouvel élément de la cour des grands de notre football.

Un Berkane qui ressemble, par certains aspects au Deportivo la Corogne entre 1992 et 2004 ou à la Sampdoria entre 1990 et 2000, mais avec un plan de vol bien plus sûr et des certitudes, qui font que la RSB va continuer de muer, pour devenir le bastion fort du football marocain.

Par Amine Birouk
Le 09/01/2025 à 16h45