Avec une moyenne de points de 2,36 par match, il est sur une tendance qui n’a été dépassée dans l’histoire du championnat national depuis l’indépendance que deux fois : par le champion de l’année précédente, le Raja de Casablanca, qui détient le record absolu avec 2,46 points par match, et par son dauphin, l’AS FAR, qui a terminé la saison dernière à la deuxième place avec une moyenne de 2,37 points.
Ce rappel permet de situer le niveau de l’exploit de l’équipe chère au président de la Fédération Royale Marocaine de Football, Monsieur Fouzi Lekjaa. Ce n’est pas sa seule source de satisfaction ; son club de cœur brille également cette saison en Coupe de la CAF.
Parmi les quatre groupes qualificatifs pour les quarts de finale de la compétition, c’est le seul club qui fait carton plein : il a engrangé trois victoires sur les trois premières journées.
Malgré sa place privilégiée dans la hiérarchie du football marocain, une position que le club occupe depuis quelques années déjà, la Renaissance Sportive de Berkane est un nouveau venu dans l’élite nationale.
Il a longtemps surnagé dans les divisions inférieures, à l’exception d’une place de vice-champion en 1983 et d’un statut de finaliste de la Coupe du Trône en 1987. Son émergence coïncide avec l’élection de Fouzi Lekjaa à la tête du club en 2009.
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Depuis, l’évolution est régulière et par paliers. Il a fallu près de dix ans pour voir le club remporter son premier titre: c’était en 2018 avec la Coupe du Trône, un trophée que le club remportera deux nouvelles fois en 2021 et 2022.
La même année, Berkane va atteindre les quarts de finale de la Coupe de la CAF. C’était à l’occasion du 80ème anniversaire du club fondé en 1938 sous le nom d’«Association Sportive de Berkane», une dénomination qu’il gardera jusqu’en 1971, date à laquelle, aux termes de plusieurs fusions, le club adoptera son nom actuel.
L’année suivante, le club atteindra la finale de la Coupe de la CAF, une finale perdue face au Zamalek d’Égypte, avant d’en devenir un spécialiste. La RSB a remporté le titre continental en 2020 et 2022 et a atteint une autre finale en 2024. Elle remporte également, en 2022, la Super Coupe opposant le vainqueur de la Coupe de la CAF à celui de la Ligue des Champions d’Afrique.
Entre-temps, Fouzi Lekjaa a démissionné de la présidence du club pour se consacrer à ses nouvelles fonctions de président de la FRMF et membre des comités exécutifs au sein de la CAF et de la FIFA. Une grande première dans l’histoire des dirigeants du football marocain.
Il n’y a pas de grands clubs sans grandes personnalités pour les incarner. Les deux plus prestigieuses périodes du Real Madrid sont intimement liées à deux des plus grands dirigeants de l’histoire du football : Santiago Bernabeu et Florentino Perez.
Le Milan AC, deuxième club le plus titré de la Ligue des Champions d’Europe, est associé à Silvio Berlusconi, un homme politique de premier plan doublé d’un homme d’affaires extrêmement riche.
Sir Alex Ferguson, le légendaire entraîneur du club le plus populaire d’Angleterre, a écrit une partie de la légende de Manchester United. C’est l’entraîneur le plus souvent couronné dans l’histoire.
L’Argentin Messi, considéré par un grand nombre d’amateurs de football comme le plus grand joueur de tous les temps, a permis au Barça de conquérir toute une génération de supporters.
Pour énumérer toutes les personnalités qui ont marqué le football mondial et changé l’histoire de certains clubs ou certaines nations, il faudrait des centaines de chroniques tant le football fourmille de personnages emblématiques.
On compare souvent, avec un petit soupçon de mauvaise foi, le parcours de la Renaissance Sportive de Berkane avec ceux de deux clubs qui ont malheureusement disparu de la scène footballistique : la Renaissance Sportive de Settat et l’Union Sportive de Sidi Kacem.
Les deux clubs ont côtoyé les nuages avant de sombrer dans les bas-fonds des compétitions nationales. Ils étaient portés par des personnalités publiques avant de sortir de l’histoire par manque de continuité et de rigueur dans la gouvernance des personnes qui en avaient directement la charge. Ils animaient la compétition nationale sans jamais la dominer ; l’AS FAR, le MAS, le Wydad de Casablanca, le FUS et le Raja se partageaient les honneurs et les titres.
Ce n’est pas le cas de ce nouveau venu sur la scène nationale et africaine: Berkane fait partie des clubs sérieux dont la gouvernance est exemplaire. Il n’a pas cherché les titres mais à construire une réalité sportive. Il a fallu plusieurs années avant que nous ne le voyions inscrit comme candidat sérieux au titre de champion du Maroc.
Ses dirigeants ont retenu la leçon selon laquelle, en football, la réussite est affaire d’efforts soutenus et d’une patience éclairée.
Marquer l’histoire d’un club ne se limite pas uniquement à gagner des titres; même si ce critère est déterminant.
De grands présidents ou entraîneurs n’ont jamais gagné des trophées et pourtant l’histoire se souvient d’eux ainsi que leur influence sur l’identité du club qu’ils ont dirigé ou porté.
Ce n’est pas le cas de Berkane qui, en plus d’édifier son avenir sportif, collectionne les performances et vise à être sacré vingtième champion du Maroc de l’histoire post indépendance.
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