Dani Olmo est un talentueux joueur international espagnol. Âgé de 26 ans, il a débuté dans les catégories de jeunes de l’Espanyol, avant de rejoindre la «Masia», la célèbre école de formation du club rival, le FC Barcelone.
Très jeune, il a été transféré au Dinamo de Zagreb, le champion croate, avant d’atterrir au RB Leipzig où il a particulièrement brillé, attirant les regards de nombreux clubs, dont son club formateur, le Barça. Depuis quelques jours, il est au centre d’une polémique inédite et assez incompréhensible qui agite la presse sportive spécialisée.
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En effet, Barcelone, qui souhaite en faire l’une des pièces maîtresses de son renouveau technique, avec Lamine Yamal, Pedri, Rafinha et Robert Lewandowski, n’est pas parvenu à l’inscrire en tant que joueur de l’équipe A avant le 31 décembre 2024, date limite théorique pour la deuxième partie de la saison. C’est d’autant plus surprenant qu’il faisait partie de l’équipe depuis septembre 2024.
Barcelone est l’un des clubs les plus prestigieux du football espagnol. Enfermé dans son identité pendant de longues années, il s’en est affranchi en 1973 avec le recrutement d’un des meilleurs attaquants de tous les temps: le regretté Johan Cruyff.
L’arrivée de la coqueluche du football hollandais des années 70 au Barça a complètement révolutionné la trajectoire du club catalan, jadis chantre du football défensif. Les jeunes générations ne le savent peut-être pas, mais le créateur du «catenaccio», Helenio Herrera, a d’abord entraîné Barcelone avec lequel il a remporté plusieurs titres en pleine période de domination du Real Madrid des Di Stéfano, Puskas et Gento.
Il était partisan d’un football basé sur l’engagement physique, l’organisation en double mur défensif et des contre-attaques fulgurantes, bien loin de la philosophie actuelle du club catalan.
En arrivant à Barcelone, Cruyff va donner, en tant que joueur et plus tard en tant qu’entraîneur, une identité de jeu différente et flamboyante au Barça. Cette identité sera par la suite portée au sommet de l’élite mondiale par Pep Guardiola qui s’est appuyé sur une génération exceptionnelle composée de Messi, Iniesta, Xavi, Busquets et bien d’autres, tous formés au sein de l’école barcelonaise chère aux supporters du club dans le monde entier.
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Cette période dorée - même si le qualificatif semble faible pour la décrire - a permis à Barcelone d’accumuler les titres en Liga (le championnat espagnol) et en Ligue des Champions. Couronnés 11 fois sur les 20 dernières années et 8 fois sur 12 durant le règne de Messi, le club marchait sur l’eau.
Seuls le Bayern Munich en Europe et Auckland City dans le monde ont fait mieux que le Barça. Mais, eux, n’avaient pas la concurrence du Real Madrid, le multi-champion d’Europe et du Monde.
Ce palmarès s’est accompagné de recettes exceptionnelles: que ce soit au niveau des ventes de tickets d’entrée au stade, des produits marketing, du sponsoring, en passant par les ressources liées aux titres remportés ou aux droits télévisuels. Barça et Real sont mieux dotés sur ce registre que les autres clubs espagnols.
Ces recettes accumulées ont atteint des sommets vertigineux qui auraient théoriquement dû protéger le club de toutes difficultés financières. C’est pourtant ce qui est arrivé: le Barça est en proie à une crise financière chronique. Le club n’arrive même plus à enregistrer et garder un joueur clé pour terminer la saison. La cause en est un dépassement de la limite salariale imposée au club par les instances en charge du championnat national.
Il n’est pas seul dans ce cas; un autre joueur est concerné: son coéquipier Pau Victor. Le club avait pu les inscrire provisoirement en début de saison suite à la blessure du joueur danois Andreas Christensen. Lorsque qu’un joueur est blessé, ce sont les assurances qui règlent les émoluments et aujourd’hui, Christensen est de retour. Et ce qui devrait être une bonne nouvelle, devient un coup de frein, pour les dirigeants barcelonais.
Pour faire simple, la limite salariale autorisée pour chaque club de La Liga ne peut pas dépasser 70% du total des revenus annuels. Cette limite est conditionnée par une autre, plus contraignante: la dette globale du club ne doit pas dépasser 30% des revenus.
Le Barça n’a pas réussi à atteindre ces ratios et s’est lancé dans des montages assez spectaculaires pour y parvenir. Il a commencé par céder, pour les vingt-cinq prochaines années, 10% des droits télévisuels officiels du club, enregistrer un nouveau contrat sponsoring et aurait vendu - selon des rumeurs diffusées par certains proches du Président - une partie de la tribune VIP (les loges), pour une période de vingt ans, à un groupe émirati.
Toutes ces acrobaties n’empêchent pas ceux qui s’intéressent à la gestion du club de se poser des questions. Certains pointent du doigt les gestions précédentes, notamment le passé sulfureux des présidents Sandro Rosell et Josep Maria Bartomeu. Le premier a d’ailleurs été condamné à de la prison ferme, pour une affaire de malversations, liée au transfert de Neymar.
D’autres ont dans le collimateur le président actuel du Barça. Joan Laporta est notamment pris à partie par Victor Font, le leader de l’opposition, qui vient de publier un communiqué dans lequel il dénonce «le manque absolu de professionnalisme» de la direction actuelle. Il craint pour l’image du club, qui a pris un sacré coup.
La crise est là; comment va-t-elle prospérer ? Nul ne peut le prévoir, d’autant que le président Laporta peut encore surprendre en sortant une nouvelle carte de son chapeau.
Peu importe, cette affaire contient quelques enseignements utiles et précieux pour le microcosme du football marocain. Ils concernent la gestion des recettes et leur affectation.
Un club ne doit pas se contenter des résultats ou des revenus pour assurer sa pérennité; c’est bien la bonne affectation des recettes, avec parcimonie et à bon escient, qui compte.
Ceux qui pensent que nos grands clubs ont seulement besoin d’argent se trompent lourdement: ils nécessitent surtout une bonne gouvernance et une bonne gestion; c’est la clé du succès. Une clé qui certains ont et qui demeure aujourd’hui introuvable.