Regragui, Brahim, Mondial 2030: des vicissitudes de l’Histoire au destin commun

Walid Regragui, sélectionneur des Lions de l'Atlas.

Walid Regragui, sélectionneur des Lions de l'Atlas.. FRMF

ChroniqueDu Mondial 2030 avec la polémique concernant le lieu de la finale, de la politique de captation de talents Made in Spain de la part de la FRMF, à la visibilité de nos internationaux en Liga, voilà autant d’éléments qui peuvent d’ici 2030 mettre fin à beaucoup de préjugés concernant notre pays et qui, en attendant, propulsent le Royaume sur la Une des journaux espagnols , tous supports confondus.

Le 17/04/2025 à 17h24

Le sélectionneur national Walid Regragui était, mardi, l’invité du célèbre Talk Show sportif espagnol El Chiringuito. L’opportunité était propice pour le Patron des Lions de l’Atlas d’être le VRP du football National. Un foot Marocain qui est l’objet d’un intérêt de plus en plus accru de la part de la presse ibérique. Il est vrai que les sujets de curiosité sont de plus en plus nombreux de la part de médias qui ont longtemps snobé le voisin du Sud.

Walid Regragui adore la lumière, le strass et les paillettes. Ses dernières sorties médiatiques reflètent ce gout pour les médias qui affectionnent ce genre de produit. Sur son 31, court, précis et didactique Walid était naturellement dans son élément face au célèbre Josep Pedrerol.

Ce dernier a, en une décennie, révolutionné le concept du Late night show grâce à des scoops, de l’analyse avec un zeste de mauvaise foi, de l’humour et éventuellement des VIP. L’opportunité fait souvent le larron, et Regragui s’est transformé pour la circonstance en RP de la Fédération et par ricochet d’un football de plus en plus performant au niveau de ses différentes sélections (A, U23, U17, Féminines etc).

Sur le plan du contenu, le sélectionneur a également effectué un exercice maitrisé de communication. Aucun sujet n’a été évacué, de la durée de son contrat, à l’obligation de gagner la CAN, en passant par les attentes du public marocain ou encore les négociations avec Brahim Diaz et Lamine Yamal, avec évidemment deux issues différentes.

Walid s’est même permis de parler du difficile compromis entre faire le jeu et obtenir les résultats, et de la question existentielle relative à l’ADN du Barça obligé de bien jouer pour l’emporter, et celui du Real et sa légendaire compétitivité.

Ce moment d’échange reflète fortement cet intérêt pour la sélection du Maroc de la part des médias espagnols. Forcément, les souvenirs des Coupes du Monde 2018 et surtout 2022 sont vivaces, avec une Roja sauvée par la VAR à Kaliningrad puis touchée et coulée à Doha par les Lions de l’Atlas.

Ce passage télé où Regragui a excellé dans la langue de Cervantes, reflète l’image d’un Maroc qui n’a plus aucun complexe à avoir par rapport au football du voisin du Nord. On est loin de cette relation de dévotion que différentes générations de fans de Tanger à Lagouira ont eu pendant longtemps par rapport à la Liga, ses clubs, son organisation et surtout les brillants résultats de ses représentants en Champions League ou en Europa League. Aujourd’hui le produit marocain est davantage connu, notamment grâce à l’épopée du Qatar.

Celle-ci n’est pas le seul sujet qui permet au produit Maroc d’être de plus en plus attractif au-delà du Détroit de Gibraltar. Le processus d’organisation du Mondial 2030 a permis de relever un intérêt croissant concernant le terme Marruecos en Espagne. Notre pays, considéré au début comme la 3ème roue de la charrette par ces mêmes médias, a su renverser la vapeur, au point où il est n’est plus seulement considéré comme le figurant de service dans le dossier 2030 mais plutôt comme un partenaire sûr et crédible.

Marca, AS en passant par Relevo ou le très controversé El Confidencial regardent différemment l’apport du Maroc à la Coupe du Monde 2030. Il est vrai que le Royaume a pris le lead à différentes étapes notamment au moment de l’élaboration du Bid Book. Aujourd’hui la Fédération peut se targuer d’une stabilité que ne possède plus la RFEF éclaboussée par de multiples scandales, et d’une proximité avec la FIFA, que les Espagnols n’ont plus.

La tenue du dernier World Football Summit à Rabat en est le parfait reflet. Cet événement d’envergure a mis certains médias en mode code rouge concernant la finale du Mondial 2030. L’évidence que certains avaient concernant le nouveau Bernabeu comme lieu idéal pour ce moment charnière n’existe plus.

Les doutes ont commencé au moment de la première sortie médiatique du Président Lekjaa après l’attribution de cette Coupe du Monde. Ils ont grandi avec le projet du Grand Stade Hassan II, et iront certainement crescendo d’ici le verdict de la FIFA. Chacun des deux partenaires mettra en valeur ses atouts, mais ce qui est certain c’est que la presse du pays de Cervantes ne regardera plus la posture du Maroc avec le dédain du Conquistador ou l’indifférence du Matador.

Enfin s’il fallait utiliser la machine à remonter le temps, peu de footballeurs marocains avaient l’intérêt que leur talent méritait. Feu Larbi Benbarek, Abdellah Malaga, Zaki, Hassan Fadel, et surtout Naybet ont été des précurseurs. Mais ils n’ont jamais eu l’aura médiatique de Hakimi, En Nesyri, Bounou, et surtout Brahim Diaz.

Un Brahim qui a choisi de manière irrévocable de défendre les couleurs des Lions de l’Atlas. Le cas de l’actuel joueur du Real Madrid a poussé ses médias à tirer la sonnette d’alarme concernant la politique de captation de talents façonnés en Espagne. Les Diaz, Akhomach, Chadi Riad sont quelques exemples de joueurs capables d’apporter une plus value aux Lions de l’Atlas. Des Lions de l’Atlas de plus en plus respectés de Bilbao à Tarifa.

Et au-delà de ces trois éléments à charge pour l’Espagne du foot et ses médias friands de polémiques, de sujets qui font le buzz, de Unes incendiaires ou d’émissions nocturnes qui ont pignon sur rue, c’est la perception du Maroc qui change radicalement.

C’est aussi un rapprochement historique, qui exige une meilleure connaissance de l’autre, et qui fait suite aux vicissitudes de plusieurs siècles de confrontations entre voisins ou cousins éloignés. Le Marocain a fait ce pas, l’Espagnol est-il prêt à lui rendre la politesse?

Par Amine Birouk
Le 17/04/2025 à 17h24