Le Wydad, le Mondial des Clubs et la «Niya» de Regragui

ChroniqueAvant chaque Mondial, les observateurs faisaient mine de croire en une divine surprise venue du continent africain. Parfois par naïveté, le plus souvent par complaisance. Et au final, quelques étincelles, un semblant d’efficacité, un petit zeste de spectacle, et pas grand-chose à célébrer. Et puis il y a eu le Qatar. Regragui. Les Lions.

Le 13/06/2025 à 15h24

Depuis quelques semaines, les Marocains et les Wydadis en particulier se découvrent des envies de grand large, un parfum d’aventure dans les narines, un petit quelque chose de Christophe Colomb dans les crampons. Qu’on se rassure: il ne s’agit pas de traverser l’Atlantique à bord d’une patéra, ni de débarquer pour y massacrer quelques milliers d’Amérindiens (pardon, il ne faut plus dire «Indiens», paraît qu’ils n’aiment pas trop). Non, le dénominateur commun entre nos compatriotes et l’explorateur génois s’arrête à cette farouche volonté d’exister sur le Nouveau Continent. Colomb avait sa caravelle. Le WAC, lui, a son football.

Le Wydad s’apprête donc à écrire un nouveau chapitre de sa légende. Rendez-vous du 14 juin au 13 juillet aux États-Unis pour une Coupe du Monde des Clubs au format inédit: 32 équipes, des affiches de gala et un niveau d’exigence jamais vu dans l’histoire du tournoi.

Pourtant, cette compétition ne fait pas l’unanimité. En Europe, les critiques fusent. Beaucoup s’interrogent sur la pertinence d’un tel événement pour des joueurs déjà épuisés par un calendrier surchargé. Le rythme est infernal, la fatigue bien réelle, et certains voient dans ce Mondial des clubs un caprice de plus signé FIFA. Mais pendant que les uns râlent, les autres foncent. Et des clubs comme le Wydad, Al Ahly, l’Espérance et autres Sundowns, eux, ne comptent pas laisser passer leurs chances.

Il n’y a pas si longtemps, le foot mondial tournait exclusivement autour de l’Europe. On suivait la Liga comme un feuilleton, on se prosternait devant la Premier League, on se moquait gentiment de la Ligue 1. On se régalait avec la Ligue des Champions, on digérait devant la Ligue Europa, et on finissait le repas avec les qualifs de l’Euro. Les stars du ballon rond jouaient en Europe, point final. Et dès que tout ce beau monde partait en vacances, on se retrouvait un peu esseulés… et totalement désœuvrés.

Mais le décor a changé. Brutalement. L’Arabie saoudite a ramené Ronaldo, Benzema, Mané et compagnie. Les États-Unis, eux, ont chipé Messi et s’offrent coup sur coup la Coupe du Monde des Clubs, puis la vraie… celle des Nations. Le centre de gravité du football n’est plus tout à fait européen. Et ce n’est pas plus mal.

Dans cette redistribution des cartes, les clubs africains ont une vraie fenêtre. Et le Wydad doit s’y engouffrer. S’inspirer du parcours des Lions de l’Atlas au Qatar. De cette équipe qui, un mois durant, a fait battre le cœur de tout un continent. De cette fameuse Niya soufflée par Walid Regragui, ce mélange de foi, d’orgueil et de rage de vaincre qui a mené les Lions jusqu’au dernier carré.

Aujourd’hui, Regragui est critiqué, parfois à raison, après des prestations décevantes face à la Tunisie ou au Bénin. Mais il reste l’homme qui a mené une sélection africaine en demi-finale de Coupe du Monde. Pas ses douze victoires d’affilée à domicile qui comptent. Ce qui restera, c’est le Qatar. C’est cette empreinte dans l’Histoire. Ce truc inoubliable qu’il n’hésite d’ailleurs pas à rappeler, à chaque micro tendu.

Il fut un temps ou avant le coup d’envoi de chaque Mondial, les observateurs faisaient mine de croire en une divine surprise venue du continent noir. Parfois par naïveté, le plus souvent par complaisance. Et au final, quelques étincelles, un semblant d’efficacité, un petit zeste de spectacle, et pas grand-chose à célébrer. Et puis il y a eu le Qatar. Regragui. Les Lions.

Le Wydad a, aujourd’hui, le devoir de prolonger cette épopée. N’est-il pas ici, en partie, grâce à coach Walid et au sacre en Ligue des Champions de 2022? Il n’a pas besoin d’atteindre les demi-finales (l’écart de niveau est, à ce stade, trop important). Mais il ne doit surtout pas se contenter d’un rôle de figurant. Il doit exister, s’affirmer, faire entendre sa voix. Et croire, comme les Lions de l’Atlas, que rien n’est impossible. Si l’Amérique doit être conquise, qu’elle le soit en rouge et blanc.

Par Adil Azeroual
Le 13/06/2025 à 15h24