Ce n’est pas seulement la victoire du Maroc

Quand on écarte la Belgique, le Portugal et l’Espagne, qui figurent tous au top ten mondial, il est logique de se retrouver dans le dernier carré. Et quand on parvient à ce stade, justement, on ne regarde plus en arrière, mais devant.

Le Maroc est à 90 ou 120 minutes de la finale de la Coupe du monde. L’objectif n’est pas de faire bonne figure, mais de gagner.

Bien sûr, il faut se rappeler d’où on vient, garder les pieds sur terre.

Ne pas s’enflammer, est une chose. Il faut rester ambitieux. Cette équipe du Maroc a gagné le droit d’être ambitieuse, au même titre que les autres demi-finalistes. Elle est aussi légitime que la France de Mbappé, qui rêve d’un deuxième couronnement de suite, la Croatie qui veut venger la finale perdue en 2018, et l’Argentine qui veut s’emparer de ce titre mondial qui manque tant à Messi.

Ceux qui nous disent aujourd’hui que l’exploit du Maroc rappelle celui de la Grèce, vainqueur de l’Euro 2004 alors que personne ne l’attendait, n’ont pas forcément tort. On peut même pousser la comparaison jusqu’à l’équipe de France et de son Mondial 2018.

Ce qui lie ces équipes, c’est qu’elles sont allées au bout sans avoir développé un vrai fond de jeu. Elles ont été bonnes dans les transitions, pour contrer efficacement, solidaires derrière et tueuses devant. Elles ont été très performantes là où ça se passe, c’est-à-dire dans les deux surfaces.

Le Maroc de Regragui a quelques points en communs avec ces équipes. Il n’a pas besoin de faire la passe à dix pour se retrouver au cœur de la surface adverse (le but d’En-Nesyri face au Portugal en est la parfaite illustration). Le Maroc n’obtient pas beaucoup de corners, mais il en fait de vraies situations de but. Il ne se crée pas beaucoup d’occasions, mais il parvient à les convertir en but.

Parce qu’il ne suffit pas de bien défendre. Il faut aussi faire sortir les ballons, remonter le terrain, créer le danger. Et marquer, au final!

Ce n’est pas une question de «chance», mais de réussite. Il en faut pour aller si haut, si loin. La réussite, c’est quand Bounou fait les bons arrêts, comme celui qu’il a effectué dans les premières minutes face au Portugal.

Et si le Maroc ne prend pas beaucoup de buts, cela ne vient pas de nulle part. Dans ses trois matchs de préparation (Chili, Paraguay, Géorgie), les filets de Bounou n’ont pas tremblé. C’est la marque de Regragui. Cette solidité à toute épreuve n’est pas née au Qatar, mais bien avant.

Un autre signe de bonne santé: l'excellente tenue des remplaçants. Face au Portugal, les «suppléants» Attiat-Allah et El Yamiq ont été parmi les meilleurs sur le terrain. Au-delà de leurs qualités intrinsèques, ces deux garçons n’auraient jamais brillé si, derrière, il n’y avait pas ce collectif, cette «machine» qui fait aujourd’hui la force de cette sélection.

Parce que cette équipe porte aujourd’hui les espoirs de tout un continent et même au-delà. Cette équipe donne raison à ceux qui croient au collectif, au supplément d’âme, au sacrifice, à la solidarité, etc.

Par-delà le foot, ces valeurs sont humaines et universelles. C’est pour cela que la réussite de cette équipe est «revendiquée», et à juste titre, par tant de monde.