La première question qu’on se pose en entrant dans un tel stade, c’est comment des gradins qui sont fait pour 8000 personnes, peuvent contenir 20.000 ? Toutes les classes sociales se retrouvent au virage sud. Et ce n’est pas une nouveauté. Elles ont en commun une passion pour un Raja qu’on appelle «Club du peuple», pour cette raison justement.
Un craquage de fumigène a été fait au courant du match, avec un chant qui rappelle l’épopée du grand Raja et son histoire, avec au milieu des vendeurs de cigarettes, sucettes et cacahuètes, pour les 67 ans. Les supporters ont employé les grands moyens pour cet heureux événement.
Fin du match, et moment de communion entre les joueurs et leurs supporters qui fêtent allègrement une victoire et un anniversaire. Des fumigènes, des chants, des sourires et des larmes de joie. Mais soudainement, tout cela a cédé la place à l’horreur. En peu de temps, la fête s’est transformée en véritable tragédie.
Un moment de panique générale. Les supporters se bousculent, une pluie de pierres et autres projectiles qui leur tombent dessus. Une bagarre a éclaté dont la raison est peut-être une jalousie d’un des membres des composantes du virage rajaoui. En tout cas, il a suffi d’une petite bagarre pour qu’ensuite certains jeunes se retrouvent piétinés, poussés. Une horreur qui dit bien son nom : des visages ensanglantés qui rappellent un champ de bataille.
Des gens prononçaient la «Chahada»
Les portes de sorties semblent lointaines et la panique va crescendo. On entendait des cris, des gens récitaient la «Chahada». Si on parvenait à se relever, il fallait éviter les flaques de sang en marchant.
On reste 15 minutes au sol, jambes coincées, en évitant ceux qui marchent sur tout ce monde pour arriver à l’une des portes. Des jeunes de 13-14 ans coincés à leur tour pleuraient à chaudes larmes. On a dû en sortir deux, sûrement grièvement blessés à cause d’une foule prise de panique.
Une fois à la porte de sortie, on prend le temps de se retourner pour voir les dégâts… Des chaussures, des vestes, des casquettes jonchaient le sol. De nombreux spectateurs ont dû abandonner leurs biens pour sauver leur vie, d’autres ont fait le saut de 7m vers le tunnel réservé aux ambulances.
On descend les marches, dans le noir pour atteindre la porte de sortie, en ayant perdu une chaussure. On respire à peine, mais on savait qu’on avait survécu, et nos pensées vont aux victimes et à leurs familles. Décidément, la passion tue. Qui parmi les témoins de ce drame oserait remettre les pieds dans un stade ?