France. Emery au Paris SG: dur, dur d'être étranger

"Les entraîneurs français, et le monde du foot en général en France, ont beaucoup de confiance en eux, et regardent toujours les nouveaux arrivants avec scepticisme", estime auprès de l'AFP Jan van Winckel, adjoint belge de l'Argentin Marcelo Bielsa lors du passage de ce dernier à Marseille, en 2014-15.
Si l'on compare la saison actuelle d'Unai Emery à la première de Laurent Blanc à Paris, le bilan avant le Clasico dimanche est à peine un peu moins bon qu'en 2013. Après 9 journées de championnat, le PSG d'Emery a pris 19 points contre 21 en 2013, marqué 19 buts et encaissé 7 contre 14 et 5 avec le coach cévenol.

Van Winckel balaye l'idée qu'il y a un risque de "perdre sa culture foot" avec "un coach étranger": l'ex-lieutenant d'"El Loco" y voit plutôt "une grande force".

Cette saison, ils sont trois techniciens étrangers a exercé en France: Emery (Espagnol), donc, Leonardo Jardim (Portugais) à Monaco et Lucien Favre (Suisse) à Nice (Pablo Correa, coach de Nancy, est franco-uruguayen).

Frilosité ne veut pas dire rejet. "Je me suis toujours senti bien accueilli en France, et j'ai été surpris de voir à quel point les entraîneurs français avaient envie de s'améliorer et d'apprendre auprès d'autres cultures" footballistiques, souligne Van Winckel.

Le coach en vogue du championnat de France, Pascal Dupraz, donne raison à l'ancien adjoint de Bielsa, sévèrement critiqué à ses débuts à Marseille avant d'accéder au statut d'icône. "Ce sont des cultures différentes, donc à partir du moment où ils arrivent dans notre championnat, ils amènent quelque-chose, un autre football", se réjouit l'entraîneur de Toulouse.

Pierre Repellini, vice-président du syndicat des entraîneurs, interrogé par l'AFP, s'agace quand on aborde le sujet: "tous les ans depuis 15 ans, on me parle des entraîneurs étrangers!" Et de réfuter toute idée de protectionnisme français: "Si ce sont des entraîneurs qui n'ont pas la compétence, oui, je suis déçu (qu'on ait fait appel à eux). Mais si vous prenez Emery, il a gagné trois coupes d'Europe, ce n'est pas rien quand même! Quand Ancelotti est arrivé, il avait déjà un palmarès de trois mètres de long..." A son arrivée à Monaco, Jardim a été brocardé pour son accent en français. Emery est lui aussi moqué, à un degré moindre, dans des émissions satiriques, pour sa prononciation qui déforme les "x" et son débit de mitraillette.

L'ex-coach de Séville tient bon. Lui qui avait appris le français pendant quatre ans à l'école, a repris des cours et tient à s'exprimer dans la langue de Molière face à la presse comme devant ses joueurs.

"Je dois encore travailler la prononciation", commente le natif de Fontarabie, village à côté de la frontière française, dans Le Parisien.
Jardim a fini par surprendre tout le monde en se jouant des clichés: "je vais essayer de gagner le trophée du meilleur maçon portugais de France", avait-il lâché en 2015; puis, tout récemment, il a avoué dans L'Equipe son admiration pour le sociologue français Edgar Morin.

En trois saisons, il a surtout prouvé sa valeur sportivement: "on a accusé Jardim d'être trop défensif quand il est arrivé à Monaco", rappelle Pierre Reppelini. "Il n'a rien dit, il a bossé et démontré qu'il avait les qualités pour le job". Et qu'accent portugais ou pas, il savait se faire comprendre de son groupe.

Ce qui est peut-être ce qui manque pour le moment à Emery, un coach "très communicatif" dont le Français "n'est pas encore assez bon pour vraiment transmettre ses idées aux joueurs qui parlent français, au public et aux médias", estime Van Winckel.